Revers de la médaille

Daniel Pezat, Reflet du canton du Lingwick, mars 2010

Quand vous lirez ces lignes, les jeux olympiques (JO) de Vancouver seront du passé. Les projecteurs une fois éteints, que restera-t-il de tout ce bruit médiatique ?
 
Vancouver voulait les jeux; les élus, les marchands de béton, les investisseurs de tout poil se démenaient. Il y avait de la piastre dans l’air ! Qu’en pensaient les Vancouvérois… leur enthousiasme n’était pas aussi évident. Que dire des sans-abri que l’on envoie camper à la campagne, pour donner une belle image de la ville. Pour certains, le cauchemar.

Il n’y a pas que Montréal qui, en 1976, a eu droit à une escalade démesurée des coûts associés aux JO. À l’origine, ceux de 2010 étaient de 765 millions de dollars, le coût total des infrastructures sera plutôt de l’ordre de quatre milliards de dollars. La Colombie-Britannique voulait les jeux les plus verts de l’histoire, pour cela le comité organisateur s’associait avec la pétrolière Petro-Canada !

Parlons-en des jeux verts de Vancouver. Cette fois-ci, nous disait-on, les jeux seront plus verts que jamais et leur tenue se fera dans le respect le plus strict de l’environnement. Pas besoin de chercher longtemps pour se rendre compte qu’il n’en est rien. Un exemple, pour construire des terrains de stationnement, il a fallu raser 12 hectares de forêt. 4 800 arbres, certains vieux de plus de 500 ans, ont été sacrifiés. En tout, ce sera 100 000 arbres qu’il aura fallu abattre pour faire de la place à l’asphalte et au béton! C’est sans compter les milieux humides et l’excavation de fonds aquatiques. Le culte de l’éphémère, un beau gâchis environnemental pour 17 jours de festivités.
 
Pour sa part, le gouvernement canadien investissait 1,5 milliard de dollars pour l’entraînement et la formation des athlètes. Le but avoué, faire la plus grosse récolte de médailles de l’histoire du Canada! Pendant ce temps, au moins 760 000 enfants, soit environ un sur neuf, grandissent dans la pauvreté. Dans ce pays, le taux de pauvreté infantile est de 12 %. Au lieu d’investir pour des médailles même d’or, le gouvernement Harper ferait davantage en se souciant du mieux-être des moins nantis.

Durant les JO, on nous a beaucoup parlé de la volonté, du courage, de la persévérance des athlètes, des souffrances endurées pour pouvoir un jour monter sur le podium et qui sait, gagner la médaille d’or. Le père des JO modernes, le baron de Coubertin, disait pourtant que l’important n’était pas de gagner mais de participer. Mon œil ! Tout le monde n’en a que pour l’or. L'attention portée aux premiers est telle que le fait de remporter l'argent ou le bronze est presque perçu comme un échec ! Que dire des athlètes qui terminent une épreuve au quatrième ou cinquième rang, on n'en parle même pas. Pourtant le fait de se qualifier pour une compétition sportive internationale est déjà en soi quelque chose de notable!

Toujours plus haut, toujours plus vite, pour être le premier. La course au podium mènera beaucoup d’athlètes à des problèmes de santé permanents. Plus tard, nous devrons en assumer les coûts. Sous la pression de leurs commanditaires, des médias et des gouvernements, des femmes et des hommes vont risquer leur santé et leur vie pour quelques minutes de gloire.

La lutte pour l’obtention d’une première place est féroce. Il n’y a pas que l’honneur et la fierté qui soient au rendez-vous. Des contrats de plusieurs millions de dollars attendent les meilleurs. Les compagnies commanditaires veulent rentrer dans leur argent. Les gouvernements recherchent visibilité et prestige sur la scène internationale. Le peuple comme toujours veut être ébloui. Le temps d’une course, il oublie sa vie routinière.
 
Tout ça pour pouvoir se péter les bretelles qu'on est "plus haut, plus loin, plus fort" que le gars d'à côté ? Ça donne quoi ? Être le plus rapide pour descendre une piste de ski sans se tuer! Est-ce que ça donne un remède contre le cancer ? Est-ce que ça aide l'humanité à grandir? Pour avoir regardé ça à la télévision, nous sentons-nous plus fiers, sommes-nous plus intelligents ou de meilleures personnes ?

À part les bienfaits physiques de l'exercice, quand il n'y a pas d'usure ou de blessures sévères, je suis seul à penser que c'est un cirque inutile. Je suis seul à trouver ça niaiseux que des populations s'endettent pendant des décennies pour ça ? Dire que la ville de Québec veut ses jeux olympiques !

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