Marc Cochrane, Autour de l’Île, Saint-Pierre-de-l’Île-d’Orléans, octobre 2024
Parce que le Canada prône la paix, la famille de l’Ukrainienne Oksana Mukhina a décidé de quitter Moscou où elle a vu sa qualité de vie se détériorer depuis que la Russie est entrée en guerre avec sa mère patrie en 2022. En juillet dernier, Oksana, son conjoint et son fils ont élu domicile à l’île d’Orléans, une terre d’accueil qu’ils chérissent déjà.
La route qui les a menés au Québec était parsemée d’embûches et Oksana Mukhina a accepté de raconter son aventure dans une entrevue en anglais avec l’auteur de ces lignes.
« Je possède un permis de travail ouvert jusqu’en 2027 au Canada. Nous louons une belle maison ancestrale à Saint-Laurent et mon mari, mon fils et moi faisons le ménage à l’Auberge internationale de Québec sur la rue Sainte-Ursule dans le Vieux-Québec. L’atmosphère y est conviviale et les gens sont gentils, ce qui signifie beaucoup pour moi », a confié la dame de 48 ans.
Elle sait de quoi elle parle car, depuis que Vladimir Poutine a déclaré la guerre à l’Ukraine, en 2022, les jours heureux n’ont pas été légion.
Native de Kiev (Kyiv), la capitale de l’Ukraine, Oksana Mukhina y a grandi et étudié jusqu’à obtenir une maîtrise en histoire, en 1998, à l’Université Taras Shevchenko de Kiev, avant de se rendre à Moscou pour obtenir une maîtrise en enseignement de l’histoire.
Avant de quitter pour Moscou, elle a travaillé dans des médias écrits et électroniques en Ukraine.
Lors de son séjour de 20 ans dans la capitale russe, elle a cumulé une grande expérience dans les médias traditionnels et électroniques.
« Je travaillais comme animatrice d’une émission de musique en parallèle avec mes études en histoire. En 2003, j’ai été invitée par le réseau MTV Russia pour produire une émission de téléréalité incluant des séjours de 25 jours en Australie, en Europe et aux États-Unis. Cela montrait aux gens comment se débrouiller et prendre des décisions rapides. Cela m’a servi », a mentionné l’Orléanaise d’adoption.
Mme Mukhina a appris à vivre dans un nouvel endroit comme immigrante et non comme touriste. « J’en suis venue à regarder le côté positif des choses et à bâtir un réseau de contacts ».
Tout s’écroule
Au cours des 20 dernières années dans la capitale russe, Oksana a œuvré comme productrice d’événements et dans les médias, en plus d’enseigner aux ados au cours des sept dernières années.
Février 2022, la Russie attaque l’Ukraine et la vie devient de plus en plus dure pour Oksana et sa famille.
« C’est très difficile de travailler et de vivre à Moscou quand tu sais que la ville où vivent tes parents (Kiev) est bombardée. Mes parents ont dû déménager durant 49 jours dans le centre de l’Ukraine, loin des zones de bombardement. En Russie, les gens sont opposés à la guerre, mais ne peuvent pas le dire. Ceux qui osent en parler ou portent les couleurs du drapeau de l’Ukraine (bleu et jaune) reçoivent des amendes ou sont enfermés en prison. En plus, il y avait encore des restrictions en lien avec la COVID », a raconté la dame avec émotion.
Le couple possédait un appartement à Moscou et il a fallu six mois pour parvenir à le vendre, car beaucoup de gens voulaient quitter la ville, donc de nombreuses propriétés étaient mises en vente.
« Nous avons réussi à vendre notre appartement pour aller vivre dans un pays neutre. Mon fils et moi sommes arrivés au Canada le 21 mars dernier. Toujours en Géorgie, mon mari a obtenu un visa canadien plus tard. Auparavant, mon fils de 23 ans est resté 15 mois en Turquie et en Géorgie et moi six mois en Géorgie », s’est-elle souvenue.
Oksana et Artem ont rapidement été confrontés aux rigueurs du climat québécois en débarquant à l’aéroport de Montréal. Comme aucune chambre d’hôtel n’était libre, ils ont pris un autobus en direction de Québec.
« Nous avons trouvé une place dans un hôtel dans le Vieux-Québec en cinq minutes, la Maison Demers, aussi sur Sainte-Ursule. Mon fils et moi y sommes restés pendant deux jours. Nous sommes ensuite demeurés deux semaines à l’Auberge internationale où nous travaillons aujourd’hui », a-t-elle souligné.
Sans crédit, sans emploi, les premiers jours n’ont pas constitué une sinécure pour les nouveaux arrivants.
« C’est dur. Je n’avais jamais vécu ça. Nous avons réussi à louer une maison à l’île d’Orléans grâce à Kijiji. Nous avons rapidement aimé l’île. J’ai commencé à lire des livres sur l’histoire de l’île, en anglais et en français, et mon fils suit des cours d’alphabétisation en français pour les adultes.
Ses projets visent à amener ses parents et sa sœur à l’île d’ici la fin de 2024 malgré l’âge avancé de ses parents.
«Nos façons de vivre sont différentes, mais le Canada est un pays de paix et moi, je veux la paix », a lancé en guise de message d’espoir celle qui s’implique dans sa communauté au niveau de la cuisine collective de Saint-Laurent.