Neige, froid, Omicron, liberté, guerre

Jean-Pierre Robichaud, Le Pont de Palmarolle, Palmarolle, Mai 2022

 

Nous aurons vécu, ces derniers six mois, une série d’événements consécutifs qui ont mis nos nerfs et notre patience à rude épreuve.

Après une année et demie à affronter quatre vagues successives de Covid, nous ne nous attendions vraiment pas à ce qui allait suivre. À l’automne dernier, les modèles météo prévoyaient un hiver plus froid que la normale. Or, habituellement chez nous, qui dit plus froid, dit moins de neige. On s’est bien fait avoir; on aura eu la totale. Battu des records et de froid et de neige. En plus de quarante années dans le rang 7, jamais vu autant de neige dans ma cour et de chaque côté de la route. J’ai un ami qui s’est obstiné à bûcher son bois de poêle jusqu’au début mars.

Mesurant environ cinq pieds, il a finalement dû cesser parce que, selon son dire, seulement sa tête dépassait de la neige… Début décembre, la pandémie s’essoufflait et on nous faisait entrevoir un Noël « normal ». Il y aurait enfin plus de monde à la table, prévoyait-on. Le petit poulet de Noël 2020 serait remplacé par un joli dindon bien dodu. On en salivait déjà. Mais la Covid n’avait pas dit son dernier mot. Le gros nuage s’est abattu sur nous dans la semaine précédant Noël et Omicron (Omicrobe, disent certains) nous a neigé dessus. Eh oui! plusieurs centimètres. Ce qui a fait que tous les chemins vers un temps des Fêtes festif ont bouché. Dès le 25, on a dû se réencabaner.

Pour la deuxième année consécutive, pas de bisous ni de câlins au Jour de l’An. On a encore rentré la tête dans les épaules et attendu que la tempête passe. Le 2 février, Fred, la marmotte officielle du Québec, fut sortie de son sommeil hivernal dans le but de nous annoncer combien de semaines d’hiver il nous restait à subir. Après quelques pas hésitants sur la neige, la pauvre bestiole leva la patte et tendit un doigt en l’air. Or ce ne fut pas l’index pour jauger la température qu’elle pointa mais plutôt le majeur, semblant nous reprocher de l’avoir réveillée. Misère, qu’on en déduisit, l’hiver va être long… Mi-février, au moment où on commençait enfin à lever une à une les mesures sanitaires et à nous faire miroiter une fin d’hiver plutôt douce à supporter, l’ours qui somnolait dans sa ouache, ayant manqué le show de la marmotte, se réveilla subitement.

Cette frange de la société, « les contre toute », comme les surnommait l’ex-maire Labaume, sortit en râlant de ses quartiers d’hiver. L’ours mal léché a investi dans la cacophonie notamment les autoroutes et le centre-ville d’Ottawa pendant trois semaines. Dans le pays le plus libre de l’Occident, la meute braillait « libarté ». On dirait que ces gens ne savent pas ce qui se passe en Russie, à Cuba ou en Syrie… Début mars, voyant arriver la fin des mesures sanitaires, nous pensions en avoir enfin fini de danser le rock and roll avec tous ces événements étourdissants depuis deux ans. On allait enfin pouvoir savourer notre poutine en toute quiétude.

C’est alors qu’un autre ours, qu’on n’attendait pas lui non plus, s’est réveillé : l’ours russe. Il s’appelle Poutine, comme notre mets national, mais il n’est pas mangeable. C’est plutôt lui qui mange les autres. Sa sale guerre nous (est tombée sur la tête) juste au moment où nous allions prendre une grande inspiration et dire : en-fin!… Rien pour réduire les hormones de stress qui nous accablent depuis deux ans. Effet collatéral de cette guerre, le prix de l’essence. Les mesures sanitaires étant sur le point d’être pour la plupart éliminées, nous qui planifions sortir de notre patelin cet été et rouler un peu, à tout le moins dans notre Québec, voilà que le litre d’essence frôle maintenant les deux dollars.

C’est autour de vingt à trente dollars les cent kilomètres selon le véhicule qu’on conduit. On devra ressortir le vélo ou nos bottines de marche… En ce printemps, souhaitons que cette neige fonde au plus sacrant, qu’on parle de la pandémie au passé, que Poutine rentre dans ses terres et que le prix de l’essence redevienne abordable. Souhaitons-nous enfin de retrouver la normalité dans notre vie, avec nos familles ainsi que notre entourage.

C’est ça la « libarté ».