Gaspillage alimentaire

Catherine Bouffard, Le Reflet du canton de Lingwick, novembre 2021

 

À chaque automne, arrive son lot de sacs de carottes et de pommes destinées à « nourrir » les chevreuils que les chasseurs convoitent. J’ai l’impression qu’il y en a de plus en plus avec les années. Ce sont des palettes et des palettes de sacs à vendre devant les dépanneurs et les commerces de chasse et pêche, donc des tonnes de fruits et légumes pratiquement jetés. Je lisais un commentaire, sur les médias sociaux, où un commerçant disait qu’il avait de la difficulté à se procurer des pommes et des carottes. Il vend aussi de la betterave à sucre pour les chevreuils, cette année.

Je vous avoue que ça me dérange un peu de voir autant de nourriture pour des animaux qui sont capables de se nourrir par eux-mêmes et qui, dans la nature, n’en retrouvent pas autant ou même pas du tout.

Ça m’impressionne de voir autant de sacs, dehors, exposés au gré de la température automnale, alors que tant de personnes ont peu à se mettre sous la dent. En plus que depuis des mois, on nous annonce l’augmentation du prix des légumes et des fruits à l’épicerie.

Un sac de carottes pèse entre 20 et 23 kg (42 et 50 lb) et se vend 6 $. Supposons que seulement la moitié du sac est comestible, il reste quand même entre 9 et 11 kg (20 et 25 lb) de carottes qui peuvent nourrir une famille pendant au moins quelques mois. Lorsque l’on sait qu’un sac de 2 kg (5 lb) coûte près de 5 $ durant l’hiver, il y a là une belle économie à faire.

Ce n’est pas juste une question d’économie, mais c’est surtout à propos du gaspillage alimentaire. Beaucoup de gaspillage alimentaire pour des aliments qui se conservent bien sous plusieurs formes.

Y a-t-il quelque chose à faire? Y a-t-il un équilibre à obtenir entre notre système alimentaire et économique? Il me semble plus sensé de nourrir du monde que d’attirer les chevreuils avec des carottes et des pommes.

Est-ce qu’à la base, les producteurs et les fournisseurs font un tri de la comestibilité des légumes et des fruits destinés à la période de la chasse? J’imagine que oui, mais est-ce qu’il serait possible d’en garder encore plus pour la consommation humaine?

Car, mis à part les carottes en conserves, il y a plein de façons de les utiliser. Elles peuvent être râpées ou coupées en cubes, en bâtonnets, blanchies et congelées (idéal pour préparer les soupes et potages durant l’hiver). Sinon, faire une provision de muffins et de gâteaux aux carottes et les congeler par la suite.

Les pommes se transforment facilement en compote. Congelées en cubes, elles feront une croustade vite faite. Et si ça en fait trop, il y a toujours la possibilité d’en donner à des membres de la famille, à des amis et pourquoi pas aller en porter dans un frigo collectif ou frigo partage. Nous en avons deux dans la région : Cookshire-Eaton (rue Craig sud) et East Angus (rue Angus Sud). Il y a aussi des organismes tels la banque alimentaire, les cuisines collectives et Moisson Haut-Saint-François qui peuvent prendre vos surplus. Pour ces derniers, il serait préférable de les contacter avant de vous présenter à leurs locaux.

Notre MRC compte quatorze municipalités, et chaque municipalité offre au moins un point de vente de cette nourriture à chevreuils. Imaginez combien de personnes pourraient être nourries avec quelques sacs de carottes et de pommes! Je ne crois pas que les chevreuils s’en plaindront.