Suzie Fopa, nouvellement arrivée à Montmagny, a accepté de parler de son parcours d'immigrante aux élèves de l'école Saint-Nicolas.

Jeunesse sans frontière

Raynald Laflamme, L’Écho de Saint-François, Saint-François-de-la Rivière-du-Sud, mars 2017

Il n’y a pas d’âge pour se rapprocher de l’Autre, cet inconnu, étranger à notre regard dans notre propre ville. Un groupe de cinq élèves de 6e année de l’école primaire Saint-Nicolas à Montmagny l’ont fait plus tôt que tard en préparant une émission télé d’une demi-heure sur les religions du monde, leurs rites, leurs coutumes et ceux qui les pratiquent.

Dans le cadre de ce projet télévisuel communautaire proposé par Marie-Ève Picard de CogecoTV, appuyé par la direction de l’école et piloté de l’intérieur par l’enseignant Marc-André Beaumont, le groupe a reçu en entrevue madame Suzie Laure Fopa, une immigrante africaine installée à Montmagny depuis novembre. C’est en toute simplicité en ce samedi après-midi de février que madame Fopa, de confession protestante, a répondu aux questions du journaliste-interviewer, Alexis Moreau. Les questions préparées par lui et son équipe, dont Ariane Montminy et Anna-Rose Cantin, qui ont assisté à l’enregistrement, poursuivaient l’objectif de connaître le protestantisme, tel que l’a vécu Suzie Laure Fopa au sein de sa famille au Cameroun.

Au micro d’Alexis Moreau, Suzie Laure lui a souligné que sa religion est une branche du christianisme comme l’est le catholicisme avec qui il partage le récit fondateur, mais qui cultive aussi sa différence dont le rejet de l’autorité du pape. Toutefois, l’intérêt de l’interviewer s’est rapidement déplacé quand la Camerounaise a parlé de la croyance animiste vécue par 5% de la population de son pays. L’animiste, a-t-elle raconté, est caractérisé par des mythes et des rites variés, mais ayant comme points communs le culte des ancêtres. Dans la pratique, le crâne des défunts ancêtres était déterré après quelques années et placé en un lieu sacré dans la maison sous la garde du successeur légitime de la lignée familiale. Ceux qui en éprouvent le besoin viennent auprès de ces crânes invoquer la conscience des ancêtres à travers des prières accompagnées quelquefois de sacrifices ou de dons symboliques que l’on place à l’intérieur du crâne.

Les propos de l’invitée ont tellement suscité l’intérêt que, d’un commun accord avec l’enseignant et la régie, l’entrevue s’est prolongée en abordant cette fois le parcours d’immigrant de madame Fopa qui l’a amené à l’automne 2016 à acheter une propriété à Montmagny et à s’y installer avec deux enfants, Pavel et Maya.

 

De l’Afrique au Canada en passant par la Russie

Partie de son Afrique natale pour les études, Suzie Laure Fopa a un parcours similaire à beaucoup d’immigrants qui quittent leur pays d’origine pour poursuivre des études universitaires. Ici, seul le pays choisi est atypique : la Russie. Après une année en langue à apprendre l’alphabet russe, Suzie Laure effectue un stage à l’ambassade du Cameroun. La volonté d’enchaîner les études l’amène à effectuer à s’inscrire à la Maîtrise, puis au doctorat, tout ça au pays du froid et des Tzars. Ces études l’a ramèneront à travailler au sein d’une ambassade. Cette fois, les portes s’ouvrent à l’ambassade du Burundi. Ce sont sur les conseils de sa mère qui trouvait ce choix de pays peu sécuritaire pour elle et pour y élever une famille que Suzie Laure quitte pour le Canada, jugé plus sécuritaire.

Après son arrivée à Montréal, il y a quatre ans, Suzie Laure rêve d’un endroit plus tranquille. Direction Lévis. Après avoir repris les études au Diplôme d’études professionnels pour pouvoir occuper un emploi satisfaisant, — elle qui pourtant détient un doctorat, Madame Fopa intégrera le système de santé grâce à une emploi de téléphoniste au CISSS Chaudière-Appalaches, poste qu’elle occupe à Lévis. Pour elle, son besoin de vivre en région n’étant pas encore comblé, elle saute sur une opportunité à l’automne 2016 et se porte acquéreur d’une première maison au Canada.

« J’espère vivre longtemps à Montmagny avec ma famille », livrant ainsi un souhait cher à beaucoup d’immigrants : vivre en paix ici, y être accueillis pour finalement s’y intégrer, pour le meilleur et non pour le pire.