Louise Lamontagne, Le p’tit journal de Woburn, Woburn, mai-juin 2016
Voilà l'exploit réalisé par Marie-Josée Fortin et Ghislain Isabel, une ascension qui en dit long sur la ténacité et l'endurance de ce couple de Woburn. L'aventure s'est déroulée du 1er au 15 août 2015 sur le mont Kilimandjaro, en Tanzanie, un pays du continent africain. Ce mont s'élève à 5 895 mètres d'altitude et est donc cinq fois plus haut que le mont Gosford.
Marie-Josée et Ghislain sont partis avec un groupe de 14 personnes. Le but du groupe était d'amasser de l'argent pour remettre quatre bourses d'études et aider au financement des activités scolaires de deux écoles primaires de Lac-Mégantic en vue de contrer le décrochage scolaire. En août 2014, ils décident de se lancer dans ce projet qui nécessitera une année de préparation, de rencontres mensuelles et d'entrainements physiques. Marie-Josée tenait absolument à réaliser cette expédition avec Ghislain afin que le couple partage l'expérience et puisse se remémorer leurs souvenirs. « Notre motivation était de réaliser un voyage d'aventures en montagne, raconte Marie-Josée. D'aller plus loin que ce que l'on a l'habitude de faire, donc de se dépasser.» Pour grimper le Kilimandjaro, aucune technique d'escalade n'est nécessaire. Il s'agit de marcher vers le sommet et de s'acclimater progressivement à la rareté de l'air.
Les rencontres de Louise
Toute personne ayant l'autorisation de son médecin ainsi qu'une assurance voyage peut accomplir cette montée. Une série de vaccins permet d'éviter des ennuis de santé. Marie-Josée pratique la randonnée pédestre régulièrement. La bicyclette, la raquette et le ski de fond s'ajoutent à sa bonne forme physique. Pour sa part, Ghislain fait beaucoup de vélo. Sa conjointe le surnomme « la chèvre de montagne ». Il accompagne aussi Marie-Josée dans ses activités de plein air. Marie-Josée et Ghislain sont mariés depuis 1983 et ont deux enfants. Chacun cumule plus d'une trentaine d'années d'expérience dans leur emploi respectif. Marie-Josée exerce le métier d'adjointe administrative chez Raymond Chabot, Grant Thorton, une firme comptable de Lac-Mégantic, tandis que Ghislain travaille chez Fontaine à Woburn.
Les agences spécialisées s'occupent d'organiser ce type d'expédition. Pour se rendre à destination, 25 heures sont nécessaires, incluant 17 heures d'avion entrecoupées d'escales. « On a eu de la chance. Nous avons fait un voyage considéré comme un cinq étoiles de camping. Chaque membre du groupe avait deux personnes attitrées durant son séjour. Nous avons aussi embauché un sherpa (un porteur). Travailler comme guide de montagne est un poste de prestige. Le matin, au réveil, le personnel nous apportait notre café à la tente et des cuisiniers nous préparaient les repas.
D'autres s'occupaient du montage et démontage du campement, et de porter les bagages. Mon mari m'a dit d'en profiter, mais de ne pas prendre de mauvaises habitudes! », raconte Marie-Josée en riant à ce souvenir. L'équipe d'accompagnateurs fait tout pour que le séjour se passe bien. Elle n'a qu'un seul but: que tout le monde atteigne le sommet. Bien sûr, il y a toujours la possibilité de faire demi-tour, mais nous devons alors être escortés par un accompagnateur.
Ghislain a été choisi comme chef de groupe après que la guide québécoise se soit blessée. Grâce à sa maturité, à son calme et à son écoute, Ghislain a surmonté divers problèmes et s'en est sorti haut la main. Marie-Josée aurait aimé qu'il soit plus souvent à ses côtés, mais elle comprenait le rôle de son mari. «Pour atteindre le sommet, on doit compter six jours de montée et deux jours et demi de descente, dit-elle. Au matin de la première journée, nous avions déjà grimpé à 3 080 mètres d'altitude. J'étais stressée, je ne savais pas à quoi m'attendre. À partir de 4000 mètres, nous avons réellement ressenti le manque d'oxygène.
La sixième journée, alors que nous étions à 4 200 mètres, nous étions essoufflés juste à nous habiller. Alors, les guides nous répétaient de nous déplacer lentement, de prendre notre temps, de ne pas lâcher. D'une voix calme, ils nous expliquaient que tout se passait dans notre tête, dans notre mental. À un certain moment, je me concentrais à juste mettre un pied devant l'autre. J'étais incapable de regarder autour de moi, car ça me demandait trop d'efforts. »
Chaque jour, des paysages différents apparaissaient. Là-bas au mois d'août, c'est l'hiver et la saison sèche. Le matin se compare donc à une journée fraîche d'automne. Et plus le jour avance, plus la chaleur s'installe. Le froid revient à l'arrivée de la noirceur. Aucun moustique à l'horizon. « Le soir, raconte Marie-Josée, on regardait le ciel étoilé sans reconnaître les constellations de chez nous. La lune était blanche comme un lampadaire de rue. » Vivre en groupe demande de faire des concessions. Après le souper, le couple se retirait dans sa tente après avoir reçu les instructions pour le lendemain.
Un peu de tranquillité était bienvenu pour se préparer mentalement au jour suivant. Marie-Josée poursuit son récit : «La dernière journée de la montée, nous avons senti que nous allions toucher au but. Une fois parvenus au sommet, nous étions euphoriques. Nous nous sommes sautés au cou, nous félicitant et nous répétant sans cesse que nous avions réussi ! J'ai regardé le paysage autour de moi et j'ai réalisé à quel point je m'étais dépassée. Ayant rencontré plus de difficultés que Ghislain, j'ai eu l'impression d'avoir accompli un exploit. »
«Quant à Ghislain, poursuit Marie-Josée, il a comparé sa randonnée à une ascension de la Gosford! Il faut dire qu'il était en grande forme physique. Au sommet, le guide nous a laissé vingt minutes pour la prise de photos traditionnelle. Nous voulions rester plus longtemps afin de bien nous imprégner de ce sentiment de victoire. La descente a été moins difficile que la montée, mais très à pic. »
«Cette longue randonnée pédestre a modifié l'importance que l'on accorde aux choses de notre vie quotidienne, conclut Marie-Josée. Quand tu vois la pauvreté là-bas, ça change les perspectives. Les gens doivent aller puiser de l'eau tous les jours et ils ne savent jamais d'avance ce qu'ils vont manger. Ils vivent au jour le jour, contrairement à nous. C'est un pays en plein développement peuplé de gens accueillants, souriants et fiers. »
À écouter le récit de Marie-Josée, nul doute que ce voyage a atteint son objectif premier: le dépassement de soi. Maintenant, quel autre défi attend ce couple?