Digressions sur des amitiés particulières

Normand Gagnon, Autour de l’île, Île d’Orléans, avril 2016

«Les gens de qualité n’observent pas les règles, ils les écrivent» − (publicité)

Après les retentissantes arrestations de politiciennes et de politiciens québécois pour des chefs d’accusation allant du complot à la corruption en passant par l’abus de confiance, des ténors libéraux ont répété à satiété que les magouilles mises en lumière par la Commission Charbonneau relevaient d’une période révolue, que les règles régissant le financement des partis politiques avaient été changées et que la page était désormais tournée. Ce discours s’avère vite bancal quand on considère que le problème ne provient pas de règles inadéquates, mais de l’inobservance des règles. Et l’on peut facilement imaginer que les nouvelles règles seront aussi contournées si l’éthique politique ne change pas ; et inférer que l’environnement social, politique et économique caractérisé par la compétition, l’individualisme, l’esprit de clan (comprendre, ici, protéger et profiter des amis), la recherche effrénée du pouvoir et de l’argent ne se prête absolument pas à quelque résurgence éthique que ce soit.

 

Soigner ses amitiés

 

Pour justifier l’appui de nombreux libéraux à la motion présentée par le Parti conservateur à la Chambre des communes, motion condamnant toute tentative de la part d’organismes, de groupes ou de particuliers du Canada de promouvoir le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions contre Israël), le ministre des Affaires étrangères Stéphane Dion invoquait la longue amitié du Canada avec ce pays. Ce faisant, il consentait implicitement à une nouvelle limitation de la liberté d’expression au Canada, car le mouvement condamné ne fait qu’appeler tout à fait pacifiquement et publiquement au boycott d’un pays qui, en occupant illégalement des territoires palestiniens, prive la population de ses droits civiques élémentaires. Au nom de l’amitié, on sacrifie la liberté… et du même coup, on se livre à une acrobatie intellectuelle en amalgamant ceux qui condamnent les politiques de colonisation d’Israël avec ceux qui souhaitent sa disparition.

Le même ministre, toujours aussi éclairé, affirmait que le Canada devait honorer ses engagements de vente d’armes à l’Arabie saoudite − pays classé parl’ONG Freedom House parmi «les pires des pires» en termes de respect des droits de l’homme – et que de toute façon la quasi-totalité des alliés du Canada leur en vendait. Y aurait-il là, au-delà d’une question d’argent, d’emplois − ou d’aveuglement − quelques amitiés non encore dévoilées?

 

L’amitié, c’est fort, très fort
Règles et principes volent par-dessus bord!

 

Quand l’amitié fait encore des ravages!

 

L’ami de Sam, actuellement sous le coup d’une poursuite pour fraude et corruption, entre autres, et banni à vie du Parti libéral du Canada, notamment, est encore sur la sellette. Il aurait cette fois contrevenu à la Loi sur le lobbyisme. Peut-être s’est-il dit qu’on ne peut considérer comme du lobbying des communications avec un ami, même s’il siège au Conseil des ministres!

Quand on a la qualité de roi
N’est-on pas au-dessus des lois?
Et pourquoi s’enfarger dans les fleurs du tapis
Quand on ne fait que se plier aux mœurs du parti?

 

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