Enseignement de l’anglais intensif en 6[exp]e[/exp] année

Raynald Laflamme, L’Écho de Saint-François, Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, mars 2016

Le conseil des maires de la MRC de Montmagny force le débat de l’implantation obligatoire de l’anglais intensif dans toutes les écoles primaires de son territoire alors que le projet n’est pas sur le radar des priorités du gouvernement de Philippe Couillard. Ce projet avait d’abord été initié en 2011 sous le gouvernement Charest. En 2013, lors de son court passage au pouvoir le Parti québécois lui avait fait perdre son caractère obligatoire en refilant la décision de l’implanter ou non au conseil d’établissement de chacune des écoles primaires du Québec.

À la lumière de la décision prise le 19 janvier à la table du conseil des maires, il paraît évident pour les élus régionaux que le processus d’implantation ne va pas assez rapidement et qu’il ne donne pas le résultat escompté sur le territoire. Seule l’école primaire Monseigneur-Sirois de Cap-Saint-Ignace offrant l’anglais intensif à son programme de 6e année, où les commentaires recueillis auprès des parents de la 1re cohorte expriment « des résultats très positifs ». « Avec tous les efforts que nous déployons pour attirer de nouvelles familles dans chacune des municipalités du territoire, je considère qu’il est essentiel que notre offre de scolarisation soit attrayante et surtout compétitive », fait valoir le préfet de la MRC de Montmagny, M. Jean-Guy Desrosiers.

Pour appuyer leur décision, les maires font valoir que le Plan d’action local pour l’économie et l’emploi comporte l’action de « Mettre en place un comité pour développer des moyens innovants pour rendre l’école plus attractive et répondant aux besoins du milieu ». De plus, ils font leur les nombreuses études qui ont démontré que le programme d’anglais intensif au primaire « démontre ses avantages même auprès des élèves en difficulté, notamment au niveau de l’estime de soi et de la motivation ». Aussi, les maires ont en main un sondage maison tenu auprès des entreprises qui révèle qu’une cinquantaine d’entre elles sur les 62 ayant répondu « affirment qu’une langue autre que le français est utilisée au travail de façon occasionnelle ou récurrente, à l’oral ou à l’écrit, par au moins un employé. Et dans la quasi-totalité des cas, il s’agit de de l’anglais ».

La MRC de Montmagny entreprend donc en conséquence une démarche auprès de la Commission scolaire de la Côte-du-Sud pour qu’elle prenne « les mesures nécessaires pour mettre en place des programmes compétitifs pour le développement des habiletés linguistiques de nos jeunes du primaire en offrant l’anglais dès la maternelle, l’anglais intensif en 6e année et des programmes d’anglais enrichi au secondaire ouverts à tous les élèves intéressés ».

« Nous sommes bien conscients qu’on ne peut implanter ce programme dans toutes les écoles à la fois et que cela n’est pas toujours simple à mettre en place pour les écoles et les commissions scolaires. Mais de nombreux établissements ont entrepris le virage et peuvent témoigner des bons résultats obtenus », conclut la directrice de la MRC de Montmagny, Mme Nancy Labrecque.

 

La commission scolaire crie à l’ingérence

 

La Commission scolaire de la Côte-du-Sud n’a pas tardé à réagir à la prise de position des maires de la MRC de Montmagny en faveur de l’implantation de l’enseignement de l’anglais intensif pour tous dans les établissements primaires et secondaires de la région. Par la voix de son président, Alain Grenier, en point de presse le lendemain, elle y voit une ingérence dans sa juridiction et une impression désagréable qu’elle n’est pas active dans ce dossier.

Elle a tenu à rappeler que chaque milieu est libre de choisir le modèle d’enseignement qui lui convient le mieux et que cette décision relève de chaque conseil d’établissement comme mentionné dans la Loi sur l’instruction publique.

« Depuis plusieurs années, la commission scolaire encourage chaque établissement qui souhaite implanter l’anglais intensif en lui offrant un soutient administratif, pédagogique et financier. En ce sens, souligne-t-elle, plusieurs rencontres d’information ont été faites dans les milieux démontrant de l’intérêt envers l’anglais intensif afin de transmettre aux parents toute l’information à ce sujet. » Dans la MRC de Montmagny qui compte 7 écoles primaires desservant 14 municipalités, seules les écoles primaires de Saint-Thomas (Montmagny), de la Francolière (Saint-François), et Notre-Dame-de-l’Assomption (Berthier-sur-Mer) ont été rencontrées. Actuellement sur le territoire de la commission scolaire quatre écoles primaires offrent l’anglais intensif, dont l’école Monseigneur-Sirois de Cap-Saint-Ignace.

La commission scolaire précise que de telles démarches ont cours dans d’autres écoles et qu’elle « soutient constamment ces démarches et encourage les écoles à sonder leur milieu ». D’autre part, elle « reconnaît que chaque école est libre de choisir les orientations de son projet éducatif » et que cette vision est en tout point conforme avec le désir de Québec de laisser plus de pouvoir décisionnel aux écoles et aux parents.

« Si les municipalités veulent s’impliquer qu’elles le fassent avec des initiatives relevant de leur juridiction comme offrir des camps de jour anglais », a conclu Alain Grenier dans un propos recueilli par la journaliste Diane Gendron du journal L’Oie Blanche dans son édition du 10 février.

 

La MRC invite la population à appuyer sa démarche

 

Les personnes qui sont en faveur de la position des maires de la MRC de Montmagny pour l’implantation de l’enseignement de l’anglais intensif dans écoles primaires de son territoire sont invités à signer un registre en ligne sur le site web de la MRC à l’adresse suivante : http://www.montmagny.com . La MRC de Montmagny souhaite ainsi que les citoyens et les entreprises du mileiu puissent signifier leurs besoins et leurs attentes sur ce sujet. Il est également possible de se prononcer en retournant le coupon publié en page 11 dans cette édition de L’Écho de St-François.

 

 

Les pour et les contre

 

Dans cette montée au front en faveur de l’enseignement de l’anglais intensif à la 6e année du primaire, les pour et les contres font valoir autant d’études qu’il y a sur le sujet afin d’appuyer leur position respective.

 

Les pour

 

Dans sa prise de position publique, la MRC de Montmagny s’appuie notamment sur de « nombreuses études » démontrant les bénéfices de l’apprentissage de l’anglais intensif.

 

En anglais langue seconde

– « Des recherches confirment que les élèves ayant suivi un cours d’anglais intensif au primaire maintiennent un niveau élevé de compétences fonctionnelles et qu’ils recherchent davantage d’occasions d’utiliser l’anglais en dehors du contexte scolaire ( Lighthow et Spada, 1991 ). »

 

Dans les autres matières

– « Les expériences démontrent que tant dans les milieux où les élèves sont sélectionnés, que ceux où ils ne le sont pas, aucun impact négatif n’a été relevé sur les résultats en français et mathématique. Au contraire, il y a eu une légère hausse dans le taux de réussite ( références. C.S. du Lac-Saint-Jean, 2010 et C.S. de l’Eau-Vive, 1997, C.S. de la Beauce-Etchemin, 2002-2003 ). »

 

Élèves vulnérables

– « Selon plusieurs recherches ( Bayan, 1996, C.S. de la Beauce-Etchemin, 2002-2003, Germain et Netten, 2004 ), ces élèves ne subissent aucun effet négatif à la suite de leur participation à un projet d’anglais intensif. Ils ne se perçoivent plus comme étant les élèves les plus faibles de la classe puisqu’ils réussissent bien en anglais. Les résultats de ces élèves dans les autres matièresdémontraient une évolution ( C.S. de la Beauce- Etchemin, 2002-2003 ). »

 

Pourquoi concentrer le temps d’enseignement de l’anglais

– « Parce que la recherche démontre que la langue s’apprend à l’usage en situation d’interaction et que la concentration du temps est un facteur déterminant ) Stern, H.H., 1993 ). »

 

 

Les contre

 

Les opposants prennent à témoin les études en faveur de l’enseignement de l’anglais intensif avec cette fois un regard critique.

– « Nécessite des investissements massifs ( entre 5 000$ et 7 200$ par classe ), requiert la présence d’enseignants très à l’aise dans la langue seconde ( idéalement des locuteurs natifs ), demande l’achat massif de matériel pédagogique et peut susciter l’inquiétude des parents ( MacFarlane ( 2005 ) ) ».

– « Pourrait poser problèmes pour les élèves ayant certains retards de développement ( Genesee ( 2007 ) ».

– « Concentre l’apprentissage des autres matières et impose des devoirs supplémentaires aux élèves (Collins & White ( 2011 ) ) ».

 

La Francolière a fait le choix d’un accroissement des périodes d’anglais

 

Pour une deuxième année, le conseil d’établissement de l’école primaire La Francolière a fait le choix d’offrir 3 périodes d’anglais au lieu de 2 aux 1er et 2e cycles et 7 périodes au lieu de 3 pour les élèves de 6e année. Il s’agit d’un pas dans la bonne direction une avancé pour la direction d’école considérant que 40 % de la clientèle était constituée en 2013 d’élèves en difficulté d’apprentissage et d’élèves présentant un profil moyens-faibles à risque d’échec.

Ce portrait, qui est souvent décrit dans les milieux défavorisés où l’enseignement peine à influencer la tendance à une scolarisation sans diplomation, est en train d’être renversé à Saint-François. Le taux de réussite en écriture est passé de 54 % à 82 % en 2014-2015. Le plan stratégique de la Commission scolaire de la Côte-du-Sud a fixé pour juin 2017 un taux de réussite à 92 % en écriture de 4e année du primaire. C’est donc dans ce contexte que les efforts visant l’amélioration du taux de réussite ont été considérés dans la décision de ne pas instaurer le programme intensif 5 mois d’anglais / 5 mois de français et de mathématique en 6e année.

 

La direction en faveur de l’anglais intensif

 

Pour la directrice de l’école intégrée La Francolière / Notre- Dame de L’Assomption, Sandra Dumont, le projet d’anglais intensif est une nécessité dans notre société actuelle, mais cela ne doit pas se faire au détriment des élèves à risque d’échec. Le but de l’école primaire est d’assumer son bout dans la diplomation des élèves dans leur parcours de formation. «J’ai des responsabilités à l’égard des enfants qui ont des besoins de base. Il faut les amener plus loin», précis-et-elle dans une entrevue accordée à L’Écho de St-François». Avec son équipe d’enseignants, la directrice s’efforce de diminuer la pression à la performance pour travailler plus efficacement auprès des élèves afin que ceux-ci puissent renouer avec le plaisir de l’apprentissage à l’école.

C’est teinté de cette même approche que l’ajout des périodes d’anglais est présenté aux élèves. Le programme compte sur une plateforme informatique interactive sur laquelle l’élève prend plaisir à s’initier à l’anglais. Aussi, il lui est demandé d’écouter une émission par semaine dans la langue seconde afin d’ancrer son apprentissage.

 

Vérification des faits : Des familles font le choix d’une autre école

 

Le député Norbert Morin qui est en faveur de l’enseignement de l’anglais intensif dans les écoles primaires du territoire avait fait valoir en conférence de presse avec la MRC de Montmagny que «dans son village quelques enfants ont déserté l’école pour fréquenter celle de Saint-Raphaël où l’anglais intensif est en place depuis quatre ans», tel que le rapportait la journaliste Diane Gendron dans l’édition du 10 février de l’hebdomadaire L’Oie Blanche. Vérification faite auprès de la direction de l’école La Francolière, trois familles ont fait ce choix au cours des dernières années, parce La Francolière n’offrait pas l’enseignement de l’anglais intensif. Deux élèves ont été inscrits dans des écoles privées dans des programmes Sport-études et un élève a été inscrit à l’école de la Source de Saint-Raphaël afin de bénéficier du programme d’anglais intensif.

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