Fêtons les vingt ans du départ des Nordiques et allons jouer dehors

Marc Boutin, Droit de parole, Québec, septembre 2015

Cela se peut-il ? Eh oui ! Ça se peut : nous, les mordus du hockey de Québec, on s’est mis un milliard de beaux dollars dans les poches. Eh oui ! Un milliard sur vingt ans. Une vérité qui dépasse l’entendement. Un coup de pompon réalisé aux dépens de petits millionnaires de service (les joueurs) et de quelques affairistes locaux.

Le maire Labeaume s’est fourvoyé quand il a accusé maître Aubut d’être passé trop vite à la caisse en se débarrassant des Nordiques. Régis Labeaume ne comprend toujours qu’un côté des choses, le sien. Aubut, Dutil, la Caisse de dépôt, le Fonds FTQ, Métro Richelieu et la Daishowa sont en effet passés à la petite caisse avec leurs 75 millions (le prix de vente de l’équipe en 1995).

Mais ceux qui sont passés à la vraie grosse caisse, c’est nous autres, le peuple, avec notre milliard, 13 fois plus que le montant récolté par les amis de maître Aubut. Remercions-les quand même, ils nous ont enlevé un gros fardeau de « sur-les-bras ». Faites le calcul : 15 500 places, 42 parties et plus par année pendant 20 ans et une moyenne d’au moins 75 $ dépensés par partie par siège. Un beau milliard rien qu’à nous. Mille millions qui ne sont allés ni aux Marcel Aubut de ce monde, ni aux fabricants de roteux et de liqueurs industrielles suspectes. Mille millions qui en grande partie, sont restés ici, ont placé Québec sur la v

oie de la prospérité et ont fait passer le taux de chômage local de 12 % qu’il était il y a vingt ans à 4 % aujourd’hui. Youpi! Bien sûr, Régis le rusé a réussi, sur le tard, à nous soutirer 400 millions pour son gros éléphant blanc. Bon, passons, on lui réglera son compte plus tard. Pour l’instant, réjouissons-nous, ça nous laisse quand même 600 millions dans les poches.

 

Bières flattes et hot dogs stimés

 

Mais attention, le party va durer tant que les Nordiques ne reviendront pas et resteront là où ils sont, c’est-à-dire dans le désert. Qu’ils y restent, à Denver, El Paso, en Arizona ou au Mexique, qu’ils aillent donc pousser le caoutchouc à Vegas avec Céline ou, pourquoi pas, en Ontario avec Don « la-cerise-sur-le-gâteau ». Qu’est-ce qui est pire que d’avoir à payer un amphithéâtre? C’est d’avoir à supporter « dedans », je dis bien supporter, une équipe de la LNH. Misère.

C’est d’avoir à payer des salaires de un à dix millions par année, par individu, à des dizaines de plombiers du hockey qui, pour la plupart, iront dépenser notre bel argent sous d’autres cieux. Des pousseux de puck qu’on irait « voir jouer » et se battre comme des ados en mal de se faire casser la gueule, assis sur notre beau cul qui lui, irait s’élargissant à vue d’oeil sous le poids des bières industrielles flattes à 12 piastres le verre qu’on siroterait passivement et des hot dogs stimés sans saveur à 10 piastres qu’on avalerait par compensation émotionnelle, confectionnés, bières et hot dogs, pas-à-Québec. Et en fin de soirée, après la partie plate que les Nordiques auront perdue ou gagnée — quelle importance — contre une autre trentaine de pousseux de puck sur les mille et plus que compte la ligue nationale, retour à notre gros char stationné à 10 $ la place avec mal au ventre (plein) et au portefeuille (vide) alors que, pour les figurants et les proprios, ce serait par-icila- bonne-soupe-bonsoir-merci-beaucoup! Je dis non, non et non.

Laissons le Centre Vidéotron au duo Laladeau et Pébeaume, laissons-le aussi vide que le stade à Drapeau et allons jouer dehors. Laissons la nordique-nation à ses fantasmes, et les banlieusards pousser leurs tondeuses. Vive le sport qu’on fait, et non celui qu’on regarde.

 

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