Gérard Duhaime récompensé pour ses recherches dans le Nord

Nicole Bédard, Autour de l’île, l’île d’Orléans, février 2014

En novembre dernier, Gérard Duhaime recevait le Prix de la recherche scientifique sur le Nord 2013. À cette occasion, la Commission canadienne des affaires polaires lui remettait la Médaille commémorative du Centenaire de la 1re Année polaire 1882-1883 et une bourse de 10 000$. Il était le 22e Canadien à être ainsi reconnu pour son travail de recherche exceptionnel contribuant à l’amélioration des conditions de vie des populations nordiques. Il nous a accueillis dans sa résidence de Saint-François, partageant avec nous sa passion pour le Nord. M. Duhaime est sociologue et politicologue de formation, professeur au Département de sociologie de l’Université Laval et titulaire de la Chaire du Canada sur la condition autochtone comparée. Il est reconnu internationalement pour ses nombreux travaux de recherche sur le Nord. Il a participé aux travaux du Conseil de l’Arctique, groupe de travail formé de représentants de huit pays nordiques de la planète dont la mission est d’unir les recherches de scientifiques de différentes disciplines (géographes, géologues, etc.).

Lors de la quatrième Année polaire organisée, à Paris, par l’Union scientifique internationale et l’Organisation météorologique mondiale, en 2007-2008, sa contribution a été déterminante: seul représentant des sciences sociales au comité de planification, ses interventions ont permis d’intégrer au programme les questions reliées aux communautés humaines peuplant ces territoires. Au cours des Années polaires internationales précédentes, on ne considérait que les expéditions et recherches scientifiques ayant trait aux mammifères marins, aux poissons, aux animaux, à la glace, aux conditions climatiques, etc. Grâce à son apport, on a pu consacrer des fonds à la recherche sur les populations des régions polaires afin d’améliorer leurs conditions de vie.

 

La voie du Nord

 

En 1980, alors qu’il est étudiant au CEGEP, Gérard Duhaime accepte un emploi d’été dans le Nord-du-Québec. Il descend de l’avion, traverse un petit village et voit de modestes maisons qui avaient servi aux militaires à l’époque de la guerre froide, dans les années 50, et qui laissaient entrevoir le dénuement des habitants. Cette image de pauvreté ne le laisse pas indifférent; elle le marquera et le poussera à vouloir comprendre la société. Pourquoi il y a des riches et des pauvres? Sa réflexion l’amènera même à s’engager plus tard dans une vaste mission de recherche favorisant l’épanouissement économique et sociopolitique des populations autochtones.

Mais avant de retourner sur la voie du Nord, il fait une pause en théâtre, il étudie les sciences politiques et se consacre au journalisme. Il constate qu’en exerçant cette fonction il continue d’accumuler des images de la vie des gens dans son esprit, mais il se rend compte qu’il ne peut que raconter ce qu’il voit, sans pouvoir agir toutefois. Il a, alors, la certitude qu’il lui faut étudier la sociologie pour vraiment connaître les besoins des populations du Nord, tant sur le plan économique qu’environnemental. Il explique que nos connaissances des Inuits se limitaient à certains clichés qui nous ont empêchés de voir «qu’elle n’est pas une société totalement différente de la nôtre».

 

La voix des peuples autochtones

 

Pour lui, il est essentiel d’écouter la voix des peuples autochtones pour s’engager sur la voie du Nord. C’est avec la collaboration des habitants de ces milieux qu’il en est arrivé, par exemple, à cerner le grave problème de la pollution de leur environnement. L’une de ses recherches l’a amené à identifier 600 sites de déchets (produits pétroliers et chimiques, machinerie) laissés par les compagnies minières et par Hydro-Québec. Après des démarches en demandes de subventions et des pourparlers avec les deux paliers de gouvernement, c’est finalement l’aide d’une fondation charitable juive intéressée par cette recherche qui lui a permis de s’adjoindre une équipe de travail sur le terrain. C’est grâce à ses recherches qu’une campagne de nettoyage annuelle fut instaurée, permettant d’éviter des catastrophes écologiques dans certains cas.

M. Duhaime mentionne aussi ses études faites sur les prix à la consommation : le transport des aliments par avion fait grimper les prix et les rend inaccessibles à des populations à faibles revenus. Du même coup, cela affecte leur santé. Après des rencontres avec les gouvernements et les Nations-Unies, des programmes ont été établis pour diminuer les prix d’aliments jugés nécessaires.

 

Des œuvres grandes comme le Nord

 

M. Duhaime est l’auteur de plusieurs ouvrages de recherche dont, entre autres, une banque de données unique au Canada portant sur la démographie, la santé, l’éducation, le logement, les communications, le transport, le revenu des ménages, les conditions de vie, les entreprises et le secteur public; mentionnons aussi L’Atlas historique du Québec, Le Nord, Habitants et Mutations (épuisé). La vie à crédit, consommation et crise, fruit d’une recherche s’étalant de 1993 à 2003 et portant sur le rapport entre la société et l’économie, est une autre de ses publications s’adressant à lapopulation en général.

 

Sorray, un roman inspiré du Nord

 

M. Duhaime vient tout juste de publier un livre, ce mois-ci, dont l’intrigue se situe au cœur du Nord-du-Québec. Parmi toutes les images enfouies dans son esprit, «certaines qui n’entrent pas dans les livres savants» se sont alignées et l’ont inspiré. Il y a douze ans, il a commencé à écrire un roman d’amour, maintenant disponible en librairie, et dont le titre est Sorray, aux Éditions Triptyque.
 

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