L’Arche de Michel Blouin

Normand Gagnon, Autour de l’île, l’île d’Orléans, novembre 2013

Le 7 juin dernier, l’artiste peintre Michel Blouin se voyait décerner, pour son tableau intitulé L’Arche, le prix du concours Valoriser votre art à la Capitale qui poursuit l’objectif de mettre en valeur et de soutenir les membres du personnel de l’administration publique qui oeuvrent dans le domaine des arts. Michel Blouin travaille au CSSS Québec-Nord.

Le sculpteur Éric Lapointe, de l’École des métiers d’art du cégep Limoilou, a partagé ce prix. Les deux oeuvres ont pris place dans la galerie attenante au hall principal du nouveau siège social de La Capitale, groupe financier (LCGF) de la rue Saint-Amable, à Québec ; elles sont visibles de la rue.Lors du vernissage, qui s’est déroulé le 6 novembre dans le nouvel édifice de l’assureur, le maître de cérémonie, le comédien Jack Robitaille, a souligné l’approche intuitive de la couleur et des formes de même que la poésie qui se dégage de l’oeuvre de Michel Blouin. « Il s’établit, nous dit-il, un véritable dialogue entre les éléments qui composent le tableau. L’expression pure de la liberté ! ».
 

L'Arche
 

À l’instar de tableaux antérieurs de l’artiste, tels L’envol de l’ange, Le chasseur et Talisman qui résultent de l’assemblage en courtepointe d’éléments expressifs et hauts en couleur, l’Arche nous montre des figures humaines et animales regroupées autour d’un petit bateau décoré de plumes. On y évoque bien sûr ce récit de la Genèse où Noé, sur l’ordre de Dieu, construit un navire pour sauver du déluge annoncé sa famille et un couple de chaque espèce animale. Mais l’évènement raconté dans la bible est actualisé par quelques références discrètes au peuple québécois comme la chemise à carreaux par exemple. Et on y reconnaît la marque de l’artiste qui, fréquemment, fait appel à de nombreux symboles qui ajoutent une dimension supplémentaire, spirituelle, à l’oeuvre ; comme un guide pour faciliter la saisie du sens, pour élargir le cercle des initiés. Ce sont ici les figures animales surtout qui se chargent de cette fonction. Puisque, comme le dit Michel B., « nous sommes tous dans le même bateau », il nous faudra, pour vivre et survivre, mettre collectivement (abeille) à contribution toutes nos ressources pour perpétuer l’aventure humaine et la faire accéder à des niveaux supérieurs : force mentale (éléphant) et spirituelle (poisson), sagesse et vigilance (hibou), dépassement (plume).

Le grand tableau très coloré et cerclé de noir renferme 64 petites toiles marouflées regroupées selon un schéma dicté autant par la cohérence du propos que par l’harmonie des couleurs. « Un exercice long et complexe », nous avouera l’artiste. Ainsi, le centre, à dominante bleue, se trouve entouré d’une prépondérance de jaune qui se manifeste par des concentrations presque symétriquement distribuées. Ce contraste subtil mais dynamique contribue au relief subjectif de l’oeuvre : le jaune excite, le bleu invite au calme. Si l’on pousse un peu l’analyse, nous pourrions même associer à l’oeuvre le Fratres du compositeur Arvo Pärt qui évoque la longue, lente et lourde marche de l’humanité.

Le caractère plus extraverti et plus optimiste de l’oeuvre, par rapport à ce qu’il a fait jusqu’ici, nous amène à penser que l’artiste s’est peu à peu échappé de la gangue d’une vie qu’il a connue difficile et qu’il est désormais sur le chemin des grandes réalisations où l’on célèbre la richesse de la vie, de la nature et des humains – dans ce qu’ils ont de meilleur – de même que l’espoir que la force du nombre amène à surmonter les défis du siècle présent.

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