Luc Brousseau, Le Journal des citoyens, Prévost, le 21 novembre 2013
L’événement, qui a eu lieu en octobre dernier au Mont-Habitant, a attiré près de 350 visiteurs en deux jours et plus de 1350 billets ont été vendus pour le tirage d’une courtepointe grand format. Un succès au dire des organisateurs de l’association Courtepointe Québec Quilts.
Curieux comme une belette, je me suis attardé à réfléchir au travail qu'exige une courtepointe, et comme il y en avait plus de soixante sur place, mon respect et mon admiration furent largement sollicités. Au fur et à mesure des rencontres avec ces dames, qui bénévolement ont réalisé ces œuvres, on réalise le nombre astronomique d'heures de travail que nécessite une courtepointe. Ajoutez à ce travail un sens artistique et vous avez une œuvre majeure.
Quelques chiffres
Sur notre continent, les grandeurs de lit varient du petit simple au grand king et les formats de courtepointe ne sont pas tous semblables. Je vais prendre pour exemple une courtepointe pour lit queen. La dimension de la courtepointe finie sera donc de 90 par 108 pouces. La confection débute avec des tissus en parfaite condition, appelés fat quarters (18 po. x 22 po.), qui seront préalablement lavés et découpés pour ensuite les recoudre… préférablement en suivant un patron. Dans mon exemple, les morceaux auront une forme carrée de 2 pouces et seront assemblés à la machine à coudre pour former des blocs de 12 po. x 12 po. Il faudra donc environ 36 carrés par bloc, multiplié par 52 blocs (en tenant compte de la bordure et d’une bande de tissu), ce qui donne 1872 carrés à assembler.
Par la suite, les blocs seront déposés sur un grand panneau, ils seront manipulés à maintes reprises, déplacés de nouveau et repositionnés à n’en plus finir jusqu’à ce que le coup d’oeil plaise… le travail d’assemblage continu, d’un bloc à l’autre, en s’assurant que les coins s’alignent, sinon le fil à coudre passe au bistouri et on recommence. Lorsque les blocs sont tous assemblés, on souhaite toujours que le montage final soit d’équerre, sinon… encore le bistouri ! Non, ça n’arrive pas si souvent; avec l’expérience et les conseils de la guilde, les blocs sont généralement bien d’équerre au départ. Vient ensuite la bande de 2 pouces qui entoure les blocs, puis un contour de 4 pouces et juste comme on avait l’impression d’avoir fini, arrive le plus dur du travail. La devanture qui vient tout juste d’être assemblée est superposée à un molleton de coton et un dessous en tissu de finition agencé avec la devanture, le tout devant être épinglé ensemble pour l’étape suivante : le piqué.
Le piqué
À cette étape, plusieurs courtepointes prennent le chemin des oubliettes pour n’en ressortir que quelques années plus tard! Le piqué requiert une patience d’ange lorsqu’il est fait à la main, ce travail étant nécessaire puisqu’il assure une stabilité du matériel lors des lavages. La courtepointière doit donc faire des piqués à des distances raisonnables et à la grandeur de la courtepointe.
Pour les besoins de la cause, je vais proposer de faire de simples lignes droites de haut en bas et de gauche à droite aux 3 pouces, ce qui donnera un piqué final de 3 po. x 3 po. Dans la vraie vie, seules la patience et l’imagination de ces dames limitent le design du piqué, elle ne se limiterait pas à un très cartésien 3 po. x 3 po..
Considérant qu’une bonne courtepointière fait une dizaine de points au pouce, l’aiguille passant du dessus au dessous des trois épaisseurs de tissus, on comprendra pourquoi cette étape met sa volonté à rude épreuve, sans mentionner la torture physique de l’aiguille au bout du doigt. Longueur de la courtepointe : 108 po. x 10 points/po. = 1080 points x 30 rangs de large (90 po./3 po.) = 32400 points x 2 pour le sens horizontal = 64800 points.
Ne vous découragez pas, c’est presque fini… il ne reste que la bordure à coudre et l’étiquette à apposer à l’endos ! Et voilà, quelques années plus tard vous avez une belle courtepointe prête à couvrir votre lit. Il ne reste qu’à vous souhaiter de faire de beaux rêves.