Marjolaine Jolicoeur, L’Horizon, MRC des Basques, septembre 2013
Dans son manoir French, entouré de ses chiens et d’une ribambelle de jeunes minous, Victor-Lévy Beaulieu a annoncé l’abandon de sa poursuite pour diffamation par-devers Jean-Pierre Rioux, maire de Trois-Pistoles. « Ma priorité maintenant, c’est les Éditions Trois-Pistoles. Cela fait 45 ans que suis dans l’édition et j’ai publié 1 200 ouvrages québécois. En tant qu’éditeur, je rêve de fêter les 50 ans de ma maison d’édition ».
Cet automne, les Éditions Trois-Pistoles publient neuf ouvrages dont « Désobéissez ! », un vibrant appel de VLB pour l’éveil des consciences. « Il faut cesser de niaiser avec la puck. Chaque citoyen doit s’éveiller spirituellement car la spiritualité va avec la conscience. Et autant les jeunes que les personnes plus âgées doivent passer à l’action, s’indigner ne suffit plus ».
Écrire en état d’urgence
Travaillant à temps plein depuis deux ans à écrire un livre « très étrange et bizarroïde par boutte » sur le philosophe allemand Nietzsche, il dit avoir pris un temps d’arrêt au printemps dernier pour répondre « à ce sentiment d’urgence qui m’habitait » en s’attelant à son nouvel ouvrage.
S’y entremêlent souvenirs d’enfance dans le Rang de la Rallonge à Saint-Jean-de-Dieu ou dans le Grand Morial avec les écrits politiques de Tolstoï, la désobéissance-civile et la vie dans les bois de Thoreau, la non-violence de Gandhi et l’anarchie de Pierre Kropotkine. « Dès mon enfance, j’ai détesté tout ce qui englobe le mot autorité, ce pouvoir par essence injuste, puisque l’individu en s’y conformant ne fait rien d’autre que de s’aliéner dans sa liberté », écrit-il dans Désobéissez !
Le rebelle en perpétuel « état de fâcherie » est atteint, en 1964 à l’âge de dix-neuf ans, de poliomyélite. Voué à l’inactivité pendant plusieurs mois, il se met à lire Aurobindo, la Bhagavad-Gita et « La voie de la non-violence » de Gandhi, cet homme en apparence fragile qui a pourtant libéré l’Inde de l’oppression coloniale Britannique.
Après avoir découvert Gandhi, VLB suit un « sévère régime naturiste » et ajoute que s’il ne l’avait pas lu « sans doute ne me serais-je pas non plus intéressé de près à la politique et aurais-je préféré l’écriture au militantisme ».
Maitre de son destin
Même en étant un adepte de la non-violence, VLB le polémiste n’est jamais loin. Sa plume devient virulente quand il dénonce la perte du bien-être commun, l’exploitation des plus vulnérables, l’hypocrisie et la corruption. Il s’inquiète du fait que l’humanité se dirige tout droit vers un « écocide » avec la destruction systématique des écosystèmes. « Nous avons peu de temps devant nous pour renverser cet état des choses et pour y arriver, nous devrons, nous devons réinventer le combat contre le pouvoir bourgeois ».
Afin de ne pas sombrer dans le grand trou noir du désespoir, pour Victor-Lévy Beaulieu, « notre seul avenir, cette espérance qu’un jour nous atteindrons enfin à la beauté plutôt qu’à notre autodestruction comme espèce ».