Du jazz de talent, un bel arc-en-ciel

Gisèle Bart, Journal des Citoyens, Prévost

Cette fois, le 16 février, c’est une soirée jazz que Diffusions Amal’Gamme nous proposait, avec la chanteuse-pianiste Nathalie Renault et le contrebassiste Alain Picotte, deux musiciens de jazz de grand talent.

Le feuillet présentateur ne tarissait pas d’éloges pour cette Acadienne de renom qui s’est produite à travers le monde et avec les plus grands, nous la décrivant comme une « excellente pianiste » à la « voix exceptionnelle ».

La feuille de route du contrebassiste nous y apparaissait tout aussi impressionnante. Nous n’avons pas été déçus. «Cette voix qu’elle a » se déploie comme un splendide arc-en-ciel. C’est une voix bien placée qui s’étend de l’aigu le plus fin au grave parfois rauque, parfois guttural, avec un registre moyen qui frôle la perfection.

Au piano, le jeu sensible, énergique et de haut calibre, rend justice à son talent, à sa passion et à ses études universitaires. De fréquents et longs « scats » parsèment les chansons et de beaux « jams » bien menés avec un Alain Picotte très allumé font de ce récital un concert de jazz de grande qualité.

 

Une musicienne achevée

Toutes les musiques, sauf deux, sont de Nathalie. Les textes, quelques-uns écrits en collaboration avec elle, sont intéressants. Ils traitent des préoccupations quotidiennes de tout un chacun, « la difficulté d’être soi-même », « vieillir », « être belle » (ou beau, c’est selon), créer, ce qui pour elle signifie d’abord et avant tout « écrire des chansons », et bien d’autres. Le vocabulaire s’avère assez recherché, comme dans Liberté qu’elle nomme « fille de maquisard » et dont elle chante les « escadrilles ». Cependant, de toute évidence, Nathalie a pour but de nous divertir plus que de nous émouvoir.

La tenue est toute en joliesse, blondeur et peau d’ivoire, robette noire légère, d’ailleurs mentionnée dans l’une de ses chansons, faisant un rappel aux paroles de Chante pour moi, chanson d’amour dédiée à son inséparable piano : «…joies blanches de tes ivoires, ébène de mes idées noires…», chanson particulièrement bien structurée.

Énergique et rigoureuse, elle est exigeante envers elle-même. Elle recherche l’originalité, par exemple, dans des présentations parfois chantées qui se fondent dans la chanson elle-même ou encore une pièce complète où, debout, elle bat ses cuisses, ses bras et le haut de son torse comme on joue d’une batterie, accompagnée de la seule contrebasse.

Avec un humour très fin, elle nous parle de sa région où elle a « passé son enfance les fesses dans la mer et les yeux sur les Appalaches », là où le jazz écouté entre autres musiques chez ses parents est « entré en elle pour ne plus jamais en ressortir ». En rappel, pour nous interpréter un impromptu Jacques Brel, La chanson des vieux amants, c’est une toute autre facette de Nathalie Renault qui nous est apparue. Moment de grande émotion, l’interprétation toute en profondeur, à peine jazzée par endroits, fut unique et totalement personnalisée.

Après nous avoir dévoilé ce deuxième profil de sa sensibilité, elle ne peut désormais le laisser sous le boisseau. Même si, comme nous le dit sa dernière chanson, elle désire «qu’on lui laisse son jazz » et que « si on la prend, ça vient avec », nous serions nombreux à venir l’entendre dans ce répertoire, quand bon lui chanterait. Ce qui ne l’empêcherait pas de continuer à « jazzer », « jammer » et « scatter » comme elle aime le faire et comme elle le fait si bien.

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