Des missionnaires Vietnamiennes en Gaspésie

Johanne fournier, Graffici, gaspésie

Au cours des trois dernières années, huit jeunes Vietnamiennes ont débarqué en Gaspésie. Leur particularité : elles sont entrées en communauté et ont choisi de devenir missionnaires… dans la péninsule !

Âgées de 23 à 27 ans, elles sont comme toutes les autres femmes de leur âge. Elles débordent d'énergie, aiment rire, ont leur compte Facebook, communiquent avec leurs famille par Skype. Certaines sont des aspirantes, d'autres des postulantes et deux d'entre elles ont fait leur profession au sein de la communauté des Soeurs de Saint-Paul-de-Chartres.

Six vivent à la maison provinciale de la congrégation, située à Sainte-Anne-des- Monts. Les deux autres oeuvrent au sein des paroisses de Maria et de Grande-Rivière. Pour la supérieure provinciale, Sr Brigitte Savage, ces nouvelles recrues insufflent un renouveau puisque la relève se fait rare depuis les années 1980.

Leur mission, qui a débuté par l'apprentissage du français, consiste à faire du bénévolat au sein de divers organismes. « Ça nous aide beaucoup à apprendre le français », estime Giang Trinh. La plus grande difficulté réside dans la langue. « À ma première messe en français et la première fois que j'ai lu l'Évangile, j'ai pleuré, admet Trang Dô. Mais les sœurs nous aident beaucoup. »

Une autre difficulté est l'éloignement. Mais la technologie atténue leur ennui. Elles téléphonent à leur famille, envoient des courriels, communiquent par Skype et donnent des nouvelles par Facebook. La nourriture requiert aussi un effort d'adaptation. Elles ne peuvent s'empêcher de préparer le riz tous les jours!

Quoiqu'il en soit, elles ont toutes le désir de continuer à vivre en Gaspésie. « Ça nous plaît, souligne Hoa Nguyen. Au début, c'était un choc. Mais au fur et à mesure qu'on chemine avec les soeurs, on s'adapte. » Même si elles cohabitent avec une majorité de soeurs âgées de 60 à 101 ans, il n'y a aucun conflit de générations. « Elles m'aident comme des grandes soeurs », soutient Châu Vo. Trang Dô ajoute qu'elle aime beaucoup les taquiner. « On les fait beaucoup rire », confirme Hoa Nguyen.

Leur regard sur notre société est partagé. « Je crois que notre laïcité est difficile à assimiler pour elles », constate leur supérieure, Brigitte Savage. « Les gens ont des valeurs, mais je crois que les relations sexuelles arrivent trop jeunes », croit Hoa Nguyen. Par ailleurs, sa vision des couples éclatés est plutôt sévère : « Je trouve qu'avec les gardes partagées, les parents abandonnent leurs enfants. » Par contre, elle est impressionnée par la quantité de services publics dont la population dispose.

Ces jeunes femmes, qui ont toutes déjà eu un amoureux, abordent la notion du célibat sans fausse pudeur. « C'est difficile, avoue Dung Nguyen. Mais la vie spirituelle est plus importante. » Hoa Nguyen, 27 ans, qui a prononcé ses voeux en juin, après dix ans de vie au sein de la communauté, reste sereine. « Tout chemin de vie n'est pas facile, estime-telle. Tout choix est renonciation. Ce n'est pas parce que je n'aime pas la vie familiale. Si j'ai choisi le Seigneur, c'est parce que je l'aime comme une femme aime son mari. »

La motivation qui les a poussées à devenir religieuses a une couleur bien différente pour chacune. Xen Nguyen a appris à connaître les Soeurs de Saint-Paul-de-Chartres grâce à l'une de ses tantes, religieuse au sein de cette communauté. « Depuis que je suis toute  indique-t-elle. Mais c'est à l'université que j'ai décidé d'entrer en communauté. » Les Soeurs de Saint-Paul-de-Chartres sont regroupées au sein d'une congrégation missionnaire qui est disséminée à travers 35 pays, dont le Vietnam. La plupart des jeunes Vietnamiennes qui vivent en Gaspésie ont fréquenté un pensionnat administré par la communauté religieuse.

Plusieurs pensent que ces femmes sont devenues religieuses pour sortir de la misère de leur pays. Unanimement, elles rétorquent qu'elles vivaient assez confortablement et que leurs parents étaient en mesure de leur payer des études. « J'ai terminé mes études d'infirmière et j'accepterais d'aller dans des pays encore plus pauvres que le Vietnam, comme en Afrique », se défend Châu Vo.

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