Une labeaumerie, c’est quoi ?

Marc Boutin, Droit de parole, Québec

Une labeaumerie n’a rien à voir avec une parfumerie, bien au contraire. Il s’agit d’un néologisme conçu à Québec pour utilisation locale. Mais, sait-on jamais, l’expression pourrait un jour s’exporter et une fois encore, Québec serait sur la mappe de la célébrité.

Au moment où plusieurs villes du Québec sont affligées par des scandales, Québec est portée aux nues avec le quatrième meilleur maire au monde, selon la fondation City mayors de Londres. Cette organisation soi-disant indépendante et sans doute très sérieuse, n’a de toute évidence, ni le «respect de la démocratie», ni le «res­pect des électeurs», ni le «respect du patrimoine urbain» comme critères principaux quand vient le temps de choisir ses lauréats.

Et si on renversait l’ordre des priorités et qu’une autre organisa­tion tout aussi indépendante s’amusait à classer les maires sur la base des trois critères ci-haut mentionnés, peut-être qu’au final, Régis porterait la lanterne rouge.

Mais oublions les concours de popularité et tentons, avec des exemples, de définir ce qu’est une labeaumerie.

 

Les labeaumeries font des victimes

On est victime d’une labeaumerie quand, en tant que résidant, on se plaint auprès de la Ville qu’une compagnie de boisson caféi­née – néfaste pour la santé publique – a envahi pendant trois mois les rues du quartier (Place Royale-Côte d’Abraham) pour présenter une journée de sport extrême devant une bande de banlieusards et de touristes en mal de sensations fortes et que, pour toute réponse à nos doléances, on voit le maire consommer de façon baveuse et ostentatoire ladite boisson en plein Conseil de ville.

On est victime d’une labeaumerie quand, après quarante ans d’organisation bénévole d’une activité gratuite et ouverte à tous de ballon-balai, on se fait dire, en 2013, par un fonctionnaire, qu’il faut dorénavant payer 250$ pour réserver une heure de glace par semaine pour la saison d’hiver, dans une patinoire extérieure de la Ville (L’Esplanade) alors que le maire a réussi à trouver 400 millions $ pour offrir un amphithéâtre à un millionnaire.

On est victime d’une labeaumerie quand on constate qu’à la consultation publique sur le Programme particulier d’urbanisme (PPU) du quartier Saint-Roch, quatre promoteurs qui n’habitent pas le quartier ont eu l’écoute du maire alors que les demandes du Conseil de quartier, de deux comités de citoyens et d’une cin­quantaine de résidants réunis ont été tassées. Les premiers veulent construire en hauteur comme bon leur semble, les autres presque unanimement ont demandé à la Ville de réduire les hauteurs per­mises par le PPU.

On est victime d’une labeaumerie quand lors d’une soirée d’in­formation sur le PPU d’Estimauville, tenue le 19 décembre dernier (cinq jours avant Noël), on apprend que la consultation finale aura lieu le 15 du mois suivant et que les citoyens pourront, quel pri­vilège!, y présenter des mémoires. De belles Fêtes en perspective pour ceux et celles qui veulent s’engager dans l’aménagement de leur ville et pour les membres du Conseil de quartier qui, selon leur mandat, doivent consulter avant de présenter un mémoire qu’il faut tout de même écrire.

 

Une définition officielle

Une labeaumerie c’est quand un maire outrepasse, au profit d’un tiers, les règles du zonage et joue, lors d’un référendum, sa popularité régionale contre des citoyens lésés, comme cela s’est produit lord du référendum de l’Ilot Irving.

Une labeaumerie, c’est quand un maire prend sa ville pour un ter­rain de jeu pour touristes et non comme un lieu où il fait bon vivre.

Une labeaumerie, c’est quand un maire, dans les projets où il y a conflit entre un promoteur et les citoyens, prend systématique­ment la part du promoteur. Comme dans les projets Maria Goretti, Ilôt Irving, Red Bull Crashed Ice, etc.

Une labeaumerie, c’est quand un maire se crisse de ceux et cel­les qui payent son salaire en les écrasant, petit groupe par petit groupe, dans des circonstances où ils sont plus vulnérables et où son rôle premier serait de les défendre.

Une labeaumerie, c’est quand le quatrième meilleur maire au monde dit à des citoyens qui réclament le respect des règles: «Achalez-moi pas avec ça!»

 

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