Au bord de l’abîme…Le gouffre

Hélène Fradet, Le Cantonnier, Disraeli

Drame à Drummondville: tout laisse croire qu’une mère en très grande détresse a entraîné ses trois petits dans le gouffre de la mort. Une nouvelle qui laisse la population sans mots, qui frappe les gens en plein cœur. Une nouvelle qui fait plus qu’ébranler, elle interpelle profondément nos sentiments et nos valeurs individuelles et collectives. Un homicide qui en rappelle d’autres, des drames survenus lorsque des individus, en raison de leur état mental, ont nié leur maladie, perdu leur jugement et refusé d’être aidés. Pourquoi ? Comment ? À qui la faute ? Des questions dont les réponses sont souvent difficiles à formuler, car il n’y a malheureusement pas de formule magique permettant d’éviter tous ces drames.

Cependant, il y a assurément de très sérieuses questions de société à se poser. Récemment, un comité d’experts chargé d’explorer des solutions pour diminuer le nombre d’homicides intrafamiliaux au Québec déposait ses recommandations. Un rapport que nous avons qualifié être sans saveur, sans couleur et sans odeur. Non pas que les recommandations soient mauvaises; elles gravitent autour d’actions préventives. Sauf exception, leur particularité est qu’elles font appel au volontariat des personnes en détresse qui doivent elles-mêmes aller chercher de l’aide.

Le drame de Drummondville et d’autres auraient-ils pu être évités ? Il y a fort à parier que oui mais pour ce faire, il faut sortir des sentiers battus et aborder la question des droits de plein front. Est-ce socialement acceptable de laisser la préséance du droit des individus de refuser des soins et de l’aide et ce, même si la situation de toute évidence le requiert ? Est-ce socialement acceptable de laisser des membres de la famille assumer des responsabilités qui devraient être dévolues à des professionnels ? Dans le livre des familles que nous représentons, à ces deux questions, la réponse est NON.

Pour notre fédération, toute personne qui manifeste ou qui a manifesté des symptômes de troubles mentaux avec des comportements de violence devrait systématiquement, dès sa sortie de l’hôpital, bénéficier d’un suivi obligatoire. La nature et la fréquence de ce suivi devraient se moduler en fonction d’une cote de dangerosité standardisée à l’échelle du Québec. Cette intervention devrait s’appuyer sur une approche biopsychosociale et la famille devrait être nécessairement intégrée au plan de traitement.

Par ailleurs, les membres de l’entourage ne sont ni des médecins, ni des infirmiers ou des travailleurs sociaux, ils sont des accompagnateurs qui soutiennent leur proche dans son rétablissement. Ce sont de précieuses ressources, car ils peuvent aider à maintenir l’alliance thérapeutique, être une source d’information sur l’évolution de la personne et de sa maladie, ses habitudes de vie, ses attitudes et ses comportements, sans oublier qu’ils peuvent reconnaître les signes précurseurs d’une rechute. À cet égard, en aucun temps on ne devrait leur confier des responsabilités qui font appel à des mesures de contrôle ou d’encadrement légal.

Le drame de Drummondville ne s’arrête pas à la perte de vie des trois petites et innocentes victimes; il aura des retombées sur l’ensemble des membres de la famille, notamment sur la grand-maman qui a fait la macabre découverte et le père qui viennent de perdre ses trois enfants et qui doivent vivre, en ce moment, une très grande détresse émotionnelle.

Comme société, nous devons réagir et non pas seulement pleurer ou nous révolter devant ce drame. Il faut se lever et interpeller nos politiciens pour trouver des moyens législatifs et organisationnels pour contrer ce phénomène. Il faut absolument se donner les moyens de nos ambitions.

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