Carl Bergeron et Vincent Di Candido, échos Montréal, Montréal
Le nouveau ministre de la Culture, Maka Kotto, n'a pas encore tout à fait pris ses aises dans ses bureaux du Vieux-Montréal. Les deux tableaux accrochés aux murs, dont l'un – superbe – de Marcelle Ferron, sont toujours les mêmes que lors du dernier passage d'Échos, l'année dernière, pour une entrevue avec l'ex-ministre Saint-Pierre. Entend-il les garder ou faire un choix plus personnel ? « Je viens tout juste d'arriver, vraiment », dit en souriant celui qui est aussi député de Bourget.
MANDAT MINORITAIRE
M. Kotto, porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communications avant les élections, hérite comme tous ses collègues d'un mandat précaire. Les mains liées par un statut minoritaire, son gouvernement devra composer avec les autres partis à l'Assemblée nationale. Néanmoins, il se dit confiant de mener ses politiques à terme : « Le Québec engagera des pourparlers avec le gouvernement fédéral pour rapatrier les budgets et les programmes culturels, et nous comptons à cet effet sur la collaboration des autres partis. Le gouvernement fédéral a une prérogative, le pouvoir de dépenser. Et il s'en est servi au fil des années pour empiéter sur cette compétence provinciale. »
Le ton est posé, les propos prudents. Le « pouvoir de dépenser » du fédéral est un instrument redoutable d'influence, M. Kotto le sait plus que quiconque. Dans un contexte où, depuis plusieurs années, le gouvernement conservateur en poste à Ottawa poursuit une politique activiste dans le domaine culturel et « identitaire », c'est un pouvoir qui prend une couleur tout particulièrement politique.
Le ministre cite les coupures des Conservateurs dans le programme d'aide aux artistes à l'étranger (PromArt), qui avaient beaucoup fait réagir à l'époque. Ce à quoi on pourrait ajouter les récentes manœuvres autour du Musée canadien des civilisations à Gatineau, désormais rebaptisé le « Musée canadien de l'histoire ».
LOI SUR LE PATRIMOINE
Sensible à l'aspect patrimonial de la culture, M. Kotto a profité de l'entrée en vigueur, le 19 octobre dernier, de la Loi sur le patrimoine culturel pour annoncer le cinquième volet du Fonds du patrimoine culturel québécois, destiné à soutenir la mise en œuvre de la Loi. « Cette Loi est vraiment une loi d'avant-garde. Le patrimoine est le reflet de l'identité collective, et ça inclut les milieux de vie et les paysages. » Dans la foulée de la nouvelle Loi, le Conseil du patrimoine culturel remplace la Commission des biens culturels du Québec.
La notion de « patrimoine culturel » a évolué au niveau mondial pour désormais tenir compte du développement durable. C'est donc dire que, en sus des immeubles, des sites, des documents et des objets patrimoniaux, sera maintenant protégé le patrimoine immatériel (comme les paysages). C'est aussi une loi qui donne plus de pouvoir aux municipalités, lesquelles pourront entreprendre des démarches pour obtenir un statut de paysage culturel patrimonial.
L'identification du patrimoine bâti (dont une partie substantielle se trouve dans le Vieux-Montréal), notamment, fera aussi l'objet d'une attention spéciale, afin de revaloriser le sens de la continuité et de l'histoire.
MÉDIAS COMMUNAUTAIRES
Bien que nouvellement en poste, le ministre Kotto s'est montré réceptif aux revendications des médias communautaires et a assuré qu'il étudierait le dossier avec intérêt. Pour mémoire, l'ex-ministre Saint-Pierre avait mené une série de consultations fécondes auprès des médias communautaires en marge du rapport Payette pour mieux comprendre leur réalité et les défis auxquels ils étaient exposés.
Le ministre Bachand, dans son dernier budget, leur avait d'ailleurs réservé une aide supplémentaire d'un million par année pendant trois ans à partir de 2012-2013. Ces crédits visaient à appuyer, selon le budget libéral, « d'éventuelles initiatives liées au réseautage de l'information régionale sur Internet issues des médias communautaires ».