Les femmes sont-elles en train de faire éclater les plafonds de verre?

Clémence Lord, L’Attisée, Saint-Jean-Port-Joli

L’occasion était trop belle pour la laisser passer. Une première femme au Québec va occuper le fauteuil de première ministre, la plongeant du même coup dans toutes les responsabilités qui découlent de cette fonction. Exigera-ton d’elle ou lui reprochera-on (comme au cours de la campagne électorale) des choses que nous n’avons jamais exigées auparavant des hommes ou que nous ne leur avons jamais même reprochées? Devra-t-elle être parfaite ou aura-t-elle le droit à l’erreur comme ses congénères masculins qui l’ont précédée?

Peu importe nos allégeances politiques, c’est à nous toutes et tous qu’il revient d’y  réfléchir. Les femmes ont dû parcourir un long chemin avant de pouvoir occuper de hautes fonctions, tout particulièrement en politique au Québec. Est-il nécessaire de seulement rappeler que Maurice Duplessis s’est opposé, à coups de discours misogynes et avec l’énergie du désespoir, au droit de vote des femmes. Heureusement, Adélard Godbout se tiendra debout devant les sarcasmes de ce dernier et aussi face à l’opposition farouche du clergé québécois et présentera un projet de loi qui sera  finalement adopté en avril 1940.

Les femmes auront enfin le droit de voter. Auparavant, Thérèse Casgrain et Idola Jean auront fait office de pionnières, tout en étant ostracisées et ridiculisées, pour promouvoir la reconnaissance du droit de vote des femmes. Mais, malgré ce nouveau droit, il faudra attendre 21 ans, c’est tout dire, pour voir une première femme élue députée à l’Assemblée nationale en 1961 : Claire Kirkland Casgrain. Josiane Labonté, historienne, nous rappelle qu’il s’écoulera 12 années de plus avant que 5 autres femmes députées n’accèdent au salon bleu en 1976. Mais le fameux plafond de verre n’avait pas encore volé en éclats pour autant. Les cinquante ans et plus se rappelleront avoir entendu ces propos dans leurs familles ou chez leurs voisins: « Une femme qui ne vote pas du même bord que son mari, annule son vote », rien de moins. Et du même souffle, fort nombreuses sont les femmes qui n’ont sûrement pas oublié que, jusqu’en 1961, elles ont été dans l’impossibilité de signer un contrat, d’ouvrir un compte bancaire ou de signer un bail sans l’autorisation expresse de leur mari ou de leur père. On parle ici d’une totale incapacité juridique de la femme.

Oui, les femmes ont dû parcourir une longue route pour se libérer du double standard qui faisait que, même à compétences égales ou supérieures, on leur limitait encore l’accès aux plus hautes responsabilités. Mais les temps changent à petits pas et la revue Châtelaine a dressé une liste de femmes qu’elle considère, à juste titre, brillantes et allumées et qui ont marqué le demi-siècle dernier. En voici donc quelques-unes : en premier lieu celle qui, à 87 ans, n’a plus besoin d’être présentée et que plusieurs aiment avec un grand A : Jeannette Bertrand. Elle a tracé le sillon pour bien d’autres.

Suivent dans le désordre et non au mérite: Julie Payette, Lise Payette, Céline Dion, Sheila Fraser, Chantal Petitclerc, Louise Harbour, Chloé Ste-Marie, Andrée Lachapelle, etc., sans oublier la femme considérée la plus puissante dans le domaine financier au Canada, Monique Leroux. Bien sûr, la liste pourrait s’allonger encore de beaucoup. Signalons, entre autres, que pour une première fois au Québec, 2 femmes se présentaient comme chef de parti aux dernières élections provinciales: Françoise David et Pauline Marois. Toutes deux ont été élues. Signalons aussi que 41 femmes sur un total de 125 ont été élues députées. Plus près de nous dans le monde municipal, nous comptons 3 mairesses sur 14 magistrats dans la MRC de L’Islet et que sur 84 conseillers, 30 sont des femmes. La parité n’est certes pas atteinte, mais nous sommes en marche.

Les femmes en politique changent-elles le monde? À cette question, la journaliste et chroniqueuse Pascale Navarro répond: « Dans la mesure où un grand nombre de femmes en politique peuvent changer les lois, les règlements, le milieu de vie et qu’elles transmettent dans l’exercice de leur pouvoir les valeurs du groupe auquel elles appartiennent ». J’ajouterais que ces valeurs sont très souvent reliées à la famille, la santé, l’éducation et la qualité de vie en tout premier lieu.

P.-S. : Certains parmi vous penseront peut-être que cet article tient davantage du brûlot

que du billet…mais mon objectif premier n’est pas de soulever ici de violentes polémiques, mais bien de nous amener à réfléchir à ce qui, dans nos attitudes et nos actions, peut empêcher un être humain quel qu’il soit de réaliser son plein potentiel et ce peu importe la place qu’il occupe dans la société. Ainsi nous contribuerons à faire éclater les derniers plafonds de verre.

Oui, l’occasion était trop belle pour la laisser passer!

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