Marie-Pier Lemaire, le Bulletin des Chenaux, Sainte-Geneviève-de-Batiscan
Une ambiance ensoleillée où des tartans colorés sont fièrement affichés, un atelier à l’allure d’un petit musée. Sans oublier les deux métiers à tisser et les bobines de fils recyclés, une passion revitalisée par Éliette Tremblay.
Son objectif, ou plutôt sa mission de vie comme elle l’appelle : faire connaître le tartan québécois auprès du public. Un beau défi pour cette Mauriçoise septuagénaire : «Je fais quelques expositions dans la région et je prends toujours soin d’apporter mon affiche qui illustre les différents tartans associés aux provinces canadiennes.»
Mais qu’est-ce que le tartan? C’est une étoffe de laine ou autre (ex. : coton, lin, etc.) à carreaux de couleurs, typiques des peuples. Il s’agit d’un motif de lignes horizontales et verticales entrecroisées, de multiples couleurs. Le tartan doit sa renommée internationale principalement aux kilts écossais (toujours réalisés à partir de ce motif) et plus récemment à la marque de vêtements de luxe Burberry.
Il est beau, symbolique et représente notre histoire, notre appartenance, nos armoiries provinciales. Le saviez-vous? Le tartan québécois a été créé à partir des armoiries de la province et spécialement conçu pour les Jeux olympiques de 1976, à Montréal. Il y a même une journée dédiée à la célébration du tartan : le 6 avril. Le Jour du tartan reconnaît et célèbre la contribution des Écossais et de leurs descendants à la composition du tissu social canadien. Bien que le Québec n’ait jamais abrité de population écossaise importante, certains d’entre eux s’installent au Québec, après 1759, et dominent le commerce et la traite des fourrures.
«Passion» est le mot juste pour décrire ce que ressent Mme Tremblay envers le tartan québécois : «Quand j’ai vu le tartan du Québec, en 1998, sur le calendrier de l’Aféas de Plessisville, j’ai eu un coup de cœur! Je trouve ça tellement beau les carreaux! […] J’ai commencé à en créer au début des années 2000 […] et je peux facilement tisser durant des journées entières.» Plus que le simple tartan, cette mordue du carotté aime créer des vêtements mode, inspirés des nouvelles tendances saisonnières. L’automne, laissez-vous charmer par les grosses vestes de laine à carreaux rouges et verts grossiers! L’été, misez plutôt sur un vêtement léger, moderne, aux couleurs rafraîchissantes : «J’ai créé des vestes asymétriques, en tencel (fibre naturelle fabriquée à partir de pulpe d’eucalyptus), arborant des petits carreaux de couleurs vives. Pour les tisser, j’ai dû inventer ma propre technique!» Sa technique? L’utilisation d’une latte de «store» pour créer des espaces égaux entre les carreaux. Y auriez-vous pensé?
De nature créative, cette tisserande se lance dans la création du tartan, sous plusieurs formes différentes : «J’ai toujours aimé créer de nouvelles choses! Je suis comme ça dans le tissage; je veux expérimenter et aller plus loin. J’aime tester différents fils et laine.» Elle crée ainsi, avec passion, des jetés, foulards, cravates, ponchos, nappes, linges à vaisselle, essuie-mains, ceintures et même des encadrements. Ses tartans ont pratiquement tous une petite touche spéciale : «À la Maison de la Tradition, j’ai trouvé un fil recyclé aux couleurs du tartan du Québec. J’en mets quasiment dans toutes mes créations!» L’art d’oser en beauté, tout en respectant l’environnement!
Particulièrement spirituelle, elle associe les couleurs du tartan à des vertus précises : «Je fais des foulards avec les douze couleurs de chakras (centres d’énergie dans le corps). Le rouge, le vert et le bleu effacent les mémoires ancestrales. Quand je porte ces couleurs-là, ça dégage une énergie.» Son tartan idéal? Celui décoré d’une fleur de lys et de fils dorés : «C’est celui qui parle au Québec!» Préoccupée par la diffusion et le partage du patrimoine québécois, Mme Tremblay souhaite faire découvrir ce tissage au plus grand nombre : «Une femme m’a déjà dit, dans une exposition, qu’elle aimerait commencer à créer des tartans et son mari m’a dit : «Faites attention! Elle va vous copier!» Et moi de lui répondre : «Qu’elle le copie! C’est fait pour être connu auprès du public! Je serais très heureuse que plusieurs le reproduisent!»
Portée par le message et les paroles de la chanson Si on tissait ensemble des sœurs Marleau, cette tisserande serait prête à partager son expertise : «J’ai l’espace et un petit métier de disponible, chez moi. Je serais disposée à recevoir un apprenti.»
Si on tissait ensemble, coude à coude
Si on tissait ensemble, un tissu nouveau