Une démocratie… vraiment?

Gilbert Bournival, Le Stéphanois, Saint-Étienne-des-Grès, juin 2012

Le dictateur prétend savoir ce qui est bon pour la population et ne se gêne pas pour l’imposer. Le démocrate permet au peuple de décider par lui-même ce qui est bon pour lui. Quel gouvernement avons-nous?

Dans la ville voisine, le maire se voit refuser un projet par référendum. Il n’en tient pas compte. Près de la moitié de son conseil tente de l’amener à réfléchir. Il est régulièrement obligé d’utiliser son vote prépondérant pour faire pencher la balance de son bord. À Québec, le premier ministre Charest résiste dans ses décisions contre les volontés populaires manifestées par des marches, des positions claires de personnalités, des lettres dans les médias, etc. : Mont Orford, Suroi, gaz de schiste, commission d’enquête, hausse des frais de scolarité, etc. Il ne cède qu’au moment où il comprend que le peuple est en train de lui retirer sa confiance et le pouvoir lui glisser des mains. Harper, Charest, Lévesque ont de la parenté.

Les autochtones utilisaient le palabre. Devant un besoin de la population, les sages se réunissaient pour en parler. Un premier déblayage du problème. C’est quoi, d’où ça vient, les conséquences, etc. Ensuite la communauté était invitée à venir en discourir. Il n’y avait pas de décision ni d’opposition. Tout était sur la table. Chacun était libre d’exprimer son point de vue. Chaque discours ajoutait à la vision d’ensemble pour préciser le besoin et les solutions possibles. On se passait de l’un à l’autre le « bâton de la parole » qui circulait dans l’assemblée aussi longtemps qu’une personne voulait parler. Il fallait du temps. Parfois des lunes. On pouvait ainsi arriver à un consensus sur l’importance du besoin, sur la nécessité de mettre en place une réponse à ce besoin et sur les moyens pratiques à utiliser. Dans le consensus, tous arrivent à une même vision de ce qu’il faut faire et comment le faire. Dans le cas de visions différentes exprimées et non retenues par l’assemblée, les minoritaires donnent leur accord au mouvement choisi par l’ensemble. Application du Vox populi, vox Dei. Quand le peuple a parlé, sa voix est la plus près de la vérité. Il y a ralliement. Comme le disait Lincoln, la démocratie est « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Nul n’a la vérité tout seul. Les erreurs historiques des Papes en sont une démonstration.

Un gouvernement démocratique favorise la prise de parole de la population, d’où qu’elle vienne et peu importe sa couleur et sa forme. La violence, c’est la révolte devant l’inattention ou le mépris d’un gouvernement pour le vécu et l’expression d’un groupe. La démocratie souffre violence, et se maintient à travers elle. La violence est le cri des oubliés, des laissés pour compte, la parole des sans voix. Ne tentons pas de menotter la libre parole. Ouvrons les Oreilles.

Un gouvernement existe pour assurer le bien-être de tous les habitants de la cité en redistribuant la richesse collective selon les besoins des groupes et en assurant une certaine harmonisation entre les intérêts des groupes. Bien-être des citoyens et paix sociale. La personne d’abord. Tout le reste doit lui être subordonné.

Dans la cité, l’économique est un groupe puissant et indispensable. Une compagnie vise la production et le profit. Elle existe pour ça. Chaque élément de l’entreprise, machine, personnel, procédés sont au service du profit et de l’augmentation constante du chiffre d’affaires. Tu grossis ou tu meurs. Pas de démocratie ici. L’homme est au service du profit. Point. Dans la cité, la finance ne vise que le profit par le jeu des échanges, des prises de risques, des contrôles, des services, etc. On l’appelle une économie virtuelle. Elle ne produit rien de concret, sauf des chiffres et du profit. Tout pour le profit.

C’est une utopie de croire que la richesse de quelques-uns va retomber dans les poches des autres par un partage équitable. Le désir de richesse demeure insatiable, l’accumulation laisse toujours les possédants insatisfaits. Seul un peuple qui s’exprime et qui décide à travers ses dirigeants recherche le bien commun et la paix sociale.

Dans notre monde, il arrive que la finance, les cotes de crédit des gouvernements passent avant les personnes et le bien commun. Exemple : le gouvernement Bouchard qui décide un déficit zéro en un an alors que les sages lui disaient de le faire en deux ans au moins pour ne pas nuire aux services à la population. Sa peur de voir baisser la cote de crédit a passé avant la population. Sa lucidité préfère encore aujourd’hui le parti des gaz.

La création d’emplois et la création de la richesse deviennent souvent le critère suprême pour orienter les actions des gouvernements. (Plan Nord) Paver la route aux compagnies, favoriser les entrepreneurs et les promoteurs de toute catégorie, orienter l’instruction à servir les entreprises, diminuer la taille de l’état à leur profit sont autant de gestes dans ce sens. Il n’y en a plus que pour l’économie.

La finance et l’économie prennent de plus en plus de place et de pouvoirs sur les gouvernements. Ils remplacent la société civile autrefois influente. Dans leur discours, nos gouvernants sont plus attentifs aux industries qu’aux groupes sociaux. Ils ont même tendance à confier aux entreprises privées la responsabilité de servir le bien commun. C’est mettre le renard dans le poulailler. Les compagnies ne savent que se servir. D’où la nécessité de la commission Charbonneau pour les arrêter de jouer à pleine mains dans l'assiette au beurre.

Un gouvernement démocrate, à l’écoute de sa population plus souvent qu’aux élections, est le mieux placé pour mettre la personne au centre de ses décisions et le seul capable d’assurer le bien-être du peuple par le partage équitable de la richesse et des contributions. Où en sommes-nous?

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