Hausse du salaire minimum : Une crotte

Serge Lareault, L’Itinéraire, Montréal, le 1er juin 2011

« 4 $ de plus sur ma paie, une crotte », de dire un « homme de plancher », étalagiste dans l’entrepôt d’un riche commerce de Montréal. La hausse de 15 cents du salaire minimum le 1er mai dernier ne le sortira effectivement pas de la pauvreté. Mais le Conseil du patronat est « bien content » : on protège l’emploi au Québec ! C’est plutôt une belle supercherie pour continuer d’écraser les pauvres.

L’Institut de la statistique du Québec présentait récemment une étude sur l’évolution de l’emploi et la hausse du salaire minimum. Le salaire minimum a progressivement grimpé, les augmentations plus importantes se situant entre 2005 et 2010.

Selon l’étude, es hausses n’ont pas empêché la progression de la création d’emplois, toute rémunération confondue. Les statistiques le démontrent : les campagnes de peur du Conseil du patronat et des associations d’entrepreneurs sont sans fondement. Tout ce qu’ils veulent, c’est maintenir les salaires au plus bas, exploiter les travailleurs pour faire plus de profits.

Bien qu’il ne s’agisse que de 15 cents de l’heure, il se trouve des fédérations d’entreprises pour crier que l’on va tuer l’emploi et rendre nos entreprises moins compétitives. Plusieurs demandaient le gel du salaire plancher alors que tous les coûts augmentent au Québec.

Les champions du salaire minimum sont les hôtels et les restaurants. Ces deux industries, composées notamment d’établissements de luxe ou de chaînes internationales de restaurants, regroupent plus de 60 % des emplois payés au salaire minimum. Les secteurs du commerce au détail et des services occupent la deuxième place dans le palmarès des bas salaires. Là encore, on retrouve des multinationales, des grandes chaînes qui engrangent chacune des milliards par année. Ces industries n’ont pas cessé de progresser de 2005 à 2010 malgré la hausse du salaire minimum.

En fait, les grandes chaînes et les gros employeurs, canadiens et américains, qui tuent trop souvent les petits commerces indépendants, créent toujours plus d’emplois depuis 2005 et font toujours beaucoup d’argent. Comment ? En imposant le salaire minimum à plus grande échelle. De 2005 à 2011, le nombre de postes au salaire minimum est passé de 147 000 à 292 000 au Québec.

Non, on ne s’enrichit pas au Québec ! Et sur ces 292 000 travailleurs, 183 000 sont des femmes. L’exploitation semble donc viser un sexe plus que l’autre…

 

La fameuse compétitivité

 

La compétitivité d’une entreprise est évaluée par sa capacité à produire à un coût moindre que la concurrence extérieure. L’augmentation du salaire minimum affecte donc les entreprises exportatrices qui vendent leurs produits dans des pays où les salaires sont plus bas.

Mais pour tous les commerces qui exploitent leurs activités dans un marché local, soit la majorité des champions du salaire minimum, la question de la compétitivité ne se pose pas puisqu’elles produisent et vendent au Québec.

Ce sont tout simplement des employeurs qui ne veulent pas baisser leur marge bénéficiaire. Et malgré une hausse de 30 % du salaire minimum depuis les six dernières années, ils n’ont pas cessé de prendre de l’expansion et de déclarer des profits de plus en plus énormes.

Certaines petites entreprises ont de réelles difficultés de rentabilité, mais on peut les aider autrement que sur le dos des employés. Emploi-Québec vient d’ailleurs de sabrer dans les programmes d’aide aux entreprises. Le mal qui maintient la pauvreté est de ce côté-là ; il est politique.

À tous ceux qui prônent un gel du salaire minimum : Quand vous achèterez votre prochaine grosse souffleuse à neige ou votre pull griffé, ou quand vous mangerez votre crème brûlée, merci d’avoir un œil compatissant pour la personne qui vous sert. Elle a le portefeuille vide, sinon le ventre.

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