Vivre décemment

Julie Lattès, Le Monde, Montréal, le 5 mai 2011

Le 20 avril dernier, l’Organisation Populaire des Droits Sociaux (OPDS) tenait son assemblée de quartier à la Maison Marie-Jeanne-Corbeil, en vue de la manifestation du 5 mai à l’occasion de la Semaine des personnes assistées sociales.

Depuis une trentaine d’années, l’OPDS s’attache à défendre les droits des personnes assistées sociales et à lutter contre les préjugés à leur encontre. Dans cette optique, elle organise des formations, du soutien dans les démarches administratives, ou encore des manifestations sur différentes thématiques. L’idée est de permettre aux personnes assistées sociales de connaître leurs droits afin de mieux pouvoir se défendre.

Dans le cadre de la Semaine des personnes assistées sociales, qui se tenait du 2 au 8 mai, l’OPDS réaffirmait sa revendication première : l’obtention d’un revenu de citoyenneté universel atteignant le seuil de pauvreté défini par Statistiques Canada, soit 22 229$ avant impôt en 2009.

Pourquoi un revenu de nature universel ? Parce que chaque personne peut contribuer à la vie de la communauté, même si elle n’exerce pas de travail salarié. « Travailleurs salariés ou pas, on fait tous partie de la société », affirme Marie-Christine Latte, coordonnatrice de la maison Marie-Jeanne-Corbeil. Bénévolat, aide à ses voisins, création artistique sont autant d’actions essentielles à la société, qui mériteraient une revenu décent et non une aide dérisoire.

En 2011, l’aide sociale est fixée à 599,08$ par mois pour les personnes considérées sans contrainte à l’emploi. Or, le loyer moyen d’un appartement de 3 pièces et demi en 2009 était déjà de 604$ par mois. La nourriture, le chauffage, les vêtements, les soins de santé et autres aspects de la vie supposés essentiels deviennent donc des « luxes »difficiles à se procurer.

Lors de l’assemblée, les personnes présentes étaient invitées à dire ce que leur apporterait un revenu de citoyenneté par rapport à l’aide sociale. « Vivre décemment » est une réponse récurrente. Beaucoup évoquent l’insuffisance de la somme versée, ce qui les contraint à s’endetter pour des soins de santé, ou tout simplement à ne jamais rien pouvoir faire comme tout le monde, sortir de Montréal par exemple. « On pourrait sortir de notre balcon ».

La sensation d’être mal traité, de ne pas trouver d’interlocuteur qui puisse répondre à ses problèmes est également une constatation fréquente. « Si tu cases pas dans leur moule, t’as plus qu’à t’arranger tout seul. C’est toujours oui, mais », témoigne Jean-Claude Dunn.

Marie-Christine Latte rappelle que l’aide sociale concerne 500 000 personnes en comptant les enfants. « Ce n’est pas un problème d’individus, c’est un problème collectif, qui nous concerne tous. »

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